Les obstacles à l'accès aux soins se multiplient , le Monde, 22 avril 2009
Dans un article publié en janvier 2009 par la revue française de médecine générale Exercer, les docteurs Mady Denantes, Marie Chevillard, Jean-François Renard, enseignants à la faculté de médecine de Paris-VI ainsi que Patrick Flores, de l'université Paris-V, décortiquent les "inégalités sociales de santé et d'accès aux soins".
"Difficultés d'accès aux assurances complémentaires, forfaits et franchises, dépassements d'honoraires, tracasseries avec le tiers payant sont des obstacles majeurs à l'accès aux soins pour les plus démunis", relèvent les auteurs.
De fait, les obstacles financiers à l'accès aux soins se multiplient. L'absence de mutuelle peut ainsi devenir un véritable frein. Selon l'Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), 7 % des Français déclarent ne pas avoir de couverture complémentaire, mais ce taux est de 15 % pour les ménages gagnant moins de 840 euros par mois, de 13 % pour les ménages d'ouvriers et de 18 % pour les chômeurs.
Surtout, le taux d'effort des ménages pour s'offrir une couverture complémentaire varie de 10 % pour les ménages les plus pauvres à 3 % pour les plus riches, sachant que ces derniers bénéficient de contrats offrant des garanties bien supérieures aux premiers.
L'autre source d'inégalités réside "dans la forte augmentation, depuis dix ans", de la pratique des dépassements d'honoraires par les médecins.
Ces dépassements (2 milliards d'euros sur 19 milliards d'honoraires totaux), pèsent aux deux tiers sur les ménages. Il faut y ajouter la multiplication des forfaits et franchises, censés responsabiliser les patients, et qui ont fait baisser la part remboursée par l'assurance-maladie sur les soins : forfait hospitalier journalier de 16 euros et de 18 euros sur les actes supérieurs à 91 euros, forfait de 1 euro sur chaque consultation et acte de biologie, franchises de 50 centimes par boîte de médicaments et actes paramédicaux, et de 2 euros sur les transports en ambulance.
Pour les auteurs de l'étude, l'ensemble de ces restrictions "alourdit considérablement le reste à charge des plus pauvres et risque de provoquer des renoncements aux soins".
Le dernier baromètre AG2R-La Mondiale confirme les changements de comportement des assurés : près d'une personne sur cinq reconnaît avoir modifié sa consommation de soins depuis la mise en place des franchises médicales, en 2008 : la part de ces personnes est de 31 % parmi les bas revenus, alors qu'elle n'est que de 9 % parmi les hauts revenus.
Cécile Prieur