mercredi 17 juin 2009

Hôpital : le PS va saisir le Conseil constitutionnel

Hôpital : le PS va saisir le Conseil constitutionnel, Le Monde, 17 juin 2009

Jean-Marie Le Guen, député PS de Paris, a annoncé, mercredi 17 juin, une saisine du Conseil constitutionnel par son groupe contre le projet de loi "Hôpital, patients, territoire, santé" de Roselyne Bachelot. "Nous pensons que l'Assemblée nationale a été dessaisie et le Parlement méprisé", a déclaré M. Le Guen, en déplorant que le texte n'ait pas fait l'objet d'une deuxième lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Le député a aussi émis des critiques de fond sur le texte, notamment un "mélange du réglementaire et du législatif". M. Le Guen s'exprimait après avoir participé la veille à la commission mixte paritaire (CMP, sept députés, sept sénateurs) qui s'est entendue sur un texte commun Assemblée-Sénat après une lecture dans chaque chambre. Le Sénat avait entre-temps modifié le texte issu de l'examen à l'Assemblée, notamment sur la question de la gouvernance de l'hôpital.

Le projet de loi doit maintenant faire l'objet, la semaine prochaine, d'un vote définitif à l'Assemblée et au Sénat.

Santé : les parlementaires demandent une limitation des dépassements d'honoraires

Santé : les parlementaires demandent une limitation des dépassements d'honoraires, Le Monde, 17 juin 2009 Lien

Après plus de cinq mois de débats, ponctués de pétitions, de manifestations et d'un intense lobbying des professionnels de santé, la loi "Hôpital, patients, santé, territoire" (Loi HPST) achève son parcours parlementaire.

Députés et sénateurs, réunis en commission mixte paritaire (CMP), se sont accordés, mardi 16 juin sur un texte définitif, qui devrait être solennellement adopté les 23 et 24 juin 2009 par l'Assemblée nationale et le Sénat.

Sur l'initiative de députés de la majorité, la CMP a adopté un amendement demandant aux partenaires conventionnels (syndicats de médecins et Assurance-maladie) de parvenir, avant le 15 octobre 2009, à un accord pour limiter les dépassements d'honoraires. "Soit les partenaires conventionnels aboutissent à un dispositif acceptable à cette date, soit le Parlement reprendra la main", prévient Yves Bur (UMP, Bas-Rhin) l'un des députés à l'origine de l'amendement.

En dehors de ce point clé, les membres de la CMP n'ont modifié qu'à la marge le texte issu de la lecture au Sénat. Au final, même si elle a subi beaucoup de corrections, la réforme soutenue par la ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a gardé presque intacte son architecture initiale.

Une gouvernance hospitalière profondément modifiée. Malgré certaines concessions obtenues par les médecins hospitaliers, l'essentiel de la réforme de la gouvernance hospitalière est préservé.

Conformément au souhait du président de la République de doter l'hôpital d'un "véritable patron", le directeur d'établissement voit son pouvoir renforcé. Il préside un directoire, dont le vice-président est le président de la commission médicale d'établissement (CME) et nomme les médecins chefs de pôles, qui regroupent plusieurs services.

Ecartés du processus de nomination dans la version initiale du texte, les médecins hospitaliers ont obtenu que le président de la CME ait un pouvoir de proposition. En cas de désaccord sur une nomination, les directeurs d'hôpitaux auront cependant le dernier mot.

Un bilan mitigé en matière d'accès aux soins. Confronté à une augmentation des inégalités d'accès aux soins - géographiques avec la progression des déserts médicaux et financières avec l'augmentation des dépassements d'honoraires -, le gouvernement n'a que partiellement modifié la donne.

Pour lutter contre les déserts médicaux, la loi parie sur un arsenal de mesures incitatives (bourses aux jeunes médecins, aides à la création de maisons de santé…) afin de motiver les médecins à s'installer en zones sous-dotées.

Sur l'initiative des députés, le gouvernement a cependant entériné la mise en œuvre de "Contrats de santé solidarité", à partir de 2012 : il s'agit d'obliger, sous peine d'amende, les médecins des zones sur-dotées à exercer ponctuellement en zones sous-dotées. Surnommée la "taxe Bachelot", cette mesure de contrainte a été très vivement contestée par la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), qui a trouvé un efficace relais auprès des sénateurs de la majorité. Devant leur refus, la ministre l'a finalement fait adopter avec les voix de l'opposition.

Le gouvernement n'a pas fait preuve de la même ténacité sur les dépassements d'honoraires. Alors que les députés souhaitaient les limiter, notamment dans les cliniques privées, Mme Bachelot y a renoncé face à une menace de grève des jeunes internes.

Même apathie face aux médecins refusant des patients bénéficiaires de la Couverture maladie universelle (CMU) : le gouvernement, comme les parlementaires, ont finalement renoncé à les confronter à la pratique du testing, au grand dam des associations de patients, dont c'était l'une des principales revendications.

Le pari de la régionalisation du système de santé. Afin de lutter contre la dispersion des pouvoirs et des interlocuteurs médicaux sur un même territoire, la loi crée des agences régionales de santé (ARS). Ces organes déconcentrés de l'Etat devront instaurer une plus grande coordination entre l'hôpital, la médecine de ville et le secteur médico-social.

Une bataille sourde a toutefois opposé la Caisse nationale d'assurance-maladie et l'Etat sur les compétences des ARS en matière de gestion de risque (campagnes d'action sur les médecins et les assurés). Sur ce point, la CMP a fait pencher la balance en faveur des ARS : celles-ci auront un véritable droit de regard sur une prérogative jusqu'ici détenue par la seule assurance-maladie.

Des mesures à géométrie variable sur l'alcool. Le texte interdit toute vente d'alcool et de tabac aux moins de 18 ans. Il proscrit également la vente d'alcool dans les stations-service entre 18 heures et 8 heures (contre 22 heures à 6 heures aujourd'hui).

Enfin, la loi autorise la publicité pour l'alcool sur Internet malgré les vives protestations des défenseurs de la santé publique.

Cécile Prieur

mercredi 10 juin 2009

Sarkozy, tenace bienfaiteur des complémentaires santé

Sarkozy, tenace bienfaiteur des complémentaires santé, 7 juin 2009. Sur Déchiffrages, le blog de Jean-François Couvrat.

En France, les assurances privées financent d’ores et déjà 12,8% des dépenses de santé. Depuis 2006, notre pays devance le Canada et occupe à ce titre le deuxième rang mondial, selon l’OCDE. Les Etats-Unis, avec 36%, sont-ils irrattrapables ? Nicolas Sarkozy n’est pas homme à baisser les bras :

« Mon objectif est clair, vient-il d’affirmer devant la Mutualité française. Je souhaite, dans le cadre d’un partenariat exigeant, que soient confiées de nouvelles responsabilités aux organismes complémentaires. Les régimes de base ne pourront pas tout financer. Il faudra faire des choix. Nous créerons les conditions d’une prise en charge solidaire, équitable et efficiente, centrée sur la qualité, des nouveaux besoins sociaux dont le couverture ne peut reposer exclusivement sur la solidarité nationale ».

Sont explicitement visées (et ce n’est pas la première fois) : les trente affections de longue durée (ALD) - cancers, diabète, troubles mentaux… - dont la Sécurité sociale, depuis sa création, rembourse les soins à 100%, parce qu’ils sont particulièrement longs et onéreux. Cette exonération du ticket modérateur coûte à l’Assurance-maladie quelque 8 milliards d’euros par an. Les 7,5 millions de bénéficiaires y voient à juste titre un des piliers de la protection sociale française. Les « complémentaires santé », elles, flairent la bonne affaire. Si elles assurent demain ces huit milliards, leur part du marché de la santé augmentera de moitié. Merci Nicolas !

Or les conséquences sociales d’un tel basculement seraient telles que le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie, dans sa séance du 28 avril 2005, en avait fermement rejeté l’idée, estimant qu’elle « aurait un impact négatif sur la conception solidaire de notre système d’assurance maladie ».


C’est peu dire. Les inégalités, qui caractérisent aujourd’hui les complémentaires santé, en seraient sérieusement aggravées. Les premières victimes en seraient les retraités, plus souvent frappés par les maladies de longue durée. Privés d’employeurs, et supportant par conséquent intégralement les primes d’assurance complémentaire, ils verraient celles-ci augmenter de 600 euros par an et par ménage en moyenne. Le poids de ces primes passerait de 2,5% à 5% de leurs revenus en moyenne, et atteindrait 11% pour une personne seule eu minimum vieillesse, relevait le Haut conseil.

Il exprimait également ses craintes de voir les assureurs privés appliquer des stratégies purement financières, trier la clientèle et éliminer les gros risques. Déjà, plus de 14% des Français les plus pauvres sont privés de couverture complémentaire, et un Français sur sept renonce à des soins médicaux pour raisons financières.

L’aide à la complémentaire santé (ACS), qui octroie 400 euros par an et bientôt 500 euros aux plus de 60 ans, est-elle une solution ? Nicolas Sarkozy le dit. Mais le croit-il ? Sur les 2,2 à 2,7 millions de Français aujourd’hui privés de complémentaire santé, moins de 548.000 perçoivent l’ACS. Elle est réservée à ceux qui gagnent entre 620 euros par mois (le plafond pour la Couverture maladie universelle), et 745 euros.

« Notre système de santé laisse subsister des inégalités sociales fortes », a souligné le Chef de l’Etat. C’est indubitable. Pourquoi les aggraver ?

samedi 6 juin 2009

Le Sénat adopte la loi sur l'hôpital

Le Sénat adopte la loi sur l'hôpital, Le Monde, 6 juin 2009

Le bras de fer entre le Sénat, désireux de remanier le controversé projet de loi sur l'hôpital, et la ministre de la santé soucieuse de conserver l'esprit de sa réforme, s'est achevé dans la nuit de vendredi 5 à samedi 6 juin 2009.

Le texte de Roselyne Bachelot a finalement été adopté, avec les seules voix de la majorité UMP et centriste (177). L'opposition PS, les communistes et Parti de gauche et les Verts ont voté contre, à 153 voix.

Ce texte Hôpital, patients, santé et territoires (HPST), vise à réformer la gouvernance à l'hôpital mais aussi toute l'organisation du système sanitaire (création des ARS), l'accès aux soins, les rapports hôpital-cliniques privées, sans compter un volet santé publique avec prévention de l'alcoolisme, du tabagisme et de l'obésité.

AMENDE CONTRE LA DÉSERTIFICATION MÉDICALE

La discussion avait débuté le 12 mai 2009 dans une ambiance surchauffée par une contestation sans précédent de la communauté médicale, y compris de "mandarins" défilant dans la rue. Souvent mise en minorité par sa majorité, la ministre a dû louvoyer entre une commission des affaires sociales qui avait profondément réécrit le texte et une opposition remontée contre une "privatisation de la santé".

Les débats se sont apaisés avec les concessions de Roselyne Bachelot, qui a accepté de revenir sur la gouvernance de l'hôpital (les nouveaux pouvoirs du directeur étaient jugés excessifs) et des futures Agences régionales de la santé, et renoncé à la pratique du testing pour les refus de soins discriminatoires.

Mais elle a imposé l'esprit de son texte, notamment sur la démographie médicale : a été réintroduit le contrat santé solidarité, écarté par la commission, et destiné à faire participer, à partir de 2013, les médecins des zones sur-denses aux besoins des zones sous-médicalisées.

Il prévoit des mesures incitatives, comme l'octroi de bourses d'études en échange d'une installation en zone "déficitaire", mais aussi une amende d'environ 3 000 euros. Sur les dépassements d'honoraires, la ministre a refusé avec succès leur encadrement, renvoyant aux négociations Sécu/médecins.

La nouvelle procédure parlementaire a compliqué l'affaire. Le texte de la commission étant désormais celui discuté en séance, les amendements se sont multipliés (1 421 en commission, 1 370 en séance), notamment du fait du gouvernement qui voulait revenir à son texte d'origine.

Autre invité surprise : une réforme des Centres hospitaliers universitaires (CHU) intégrée sous forme d'amendements annoncés par Nicolas Sarkozy après la remise du rapport du Pr. Jacques Marescaux. Ces modifications ont provoqué la colère de l'Assemblée nationale.

Au point que son président UMP, Bernard Accoyer, a appelé à lever la procédure d'urgence (une seule lecture par chambre) instaurée sur ce projet. Il revient désormais à la commission mixte paritaire (CMP) d'effectuer la synthèse des positions de l'Asemblée et du Sénat. La tâche s'annonce délicate.

jeudi 4 juin 2009

Sarkozy veut une solution rapide sur les honoraires des médecins

Sarkozy veut une solution rapide sur les honoraires des médecins, Reuters, 4 juin 2009

Nicolas Sarkozy a annoncé que le gouvernement pourrait se saisir rapidement de la question des dépassements d'honoraires médicaux, faute d'un accord sur la question entre les médecins et l'assurance maladie.

"Je constate que les partenaires conventionnels ne sont pas parvenus à un accord sur le sujet", a-t-il dit dans un discours prononcé devant le 39e congrès de la Mutualité française.

"Le législateur doit-il reprendre la main ? Je demande au gouvernement de s'y préparer", a-t-il dit, en ajoutant qu'une décision serait prise "dans les toutes prochaines semaines".

Pour Nicolas Sarkozy, le problème des dépassements d'honoraires doit être circonscrit aux chirurgiens, anesthésistes et gynécologues-obstétriciens, le chef de l'Etat déplorant que leur importance dans les cliniques incite "certains de nos concitoyens à renoncer aux soins, ce qui n'est pas acceptable".

Les discussions actuelles portent sur la création d'un nouveau secteur dit "optionnel" qui encadrerait les dépassements d'honoraires autorisés aujourd'hui dans le secteur conventionnel 2, en y associant des "objectifs de qualité" qui permettraient aussi de meilleurs remboursements.

"Cela fait des années que le sujet des dépassements d'honoraires est sur la table. Il est temps de le traiter", a encore dit le chef de l'Etat à Bordeaux en soulignant qu'il ne voulait pas "d'un système à l'américaine, qui exclut de la couverture des frais de santé 15% de la population".

VALEURS DE LA RÉPUBLIQUE

Le gouvernement a provoqué l'ire du mouvement mutualiste en instaurant cette année une nouvelle taxe sur leur activité.

Le président de la Mutualité française n'a pas manqué de le rappeler en accueillant Nicolas Sarkozy tout en ayant pris soin d'inviter la salle, avant son arrivée, à ne pas manifester et à "respecter les valeurs de la République".

Le chef de l'Etat s'est fait applaudir quand il a évoqué les dépassements d'honoraires en notant que les positions du gouvernement et de la Mutualité française étaient aujourd'hui proches sur le sujet.

Il a dit en outre souhaiter que le gouvernement étudie "de façon approfondie" les propositions du mouvement mutualiste, qui assure la couverture d'assurance complémentaire santé de près de 38 millions de personnes, en matière de rationalisation de la prise en charge des maladies chroniques (maladies cardio-vasculaires, cancer, diabète, psychiatrie).

Celles-ci sont prises en charge à 100% par l'assurance maladie et représentent près de deux tiers de ses remboursements, ce qui a amené le gouvernement à instaurer la nouvelle taxe sur les mutuelles en estimant qu'elles devraient partager ce fardeau.

Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse

M. Sarkozy veut confier un rôle accru aux mutuelles

M. Sarkozy veut confier un rôle accru aux mutuelles, Le Monde, 4 juin 2009

C'est une révolution discrète mais profonde du système de santé qu'a esquissée Nicolas Sarkozy, jeudi 4 juin. S'exprimant en ouverture du 39e congrès de la Mutualité française, qui se tient à Bordeaux jusqu'au 6 juin, le président de la République a appelé de ses vœux "un partenariat nouveau entre l'assurance-maladie et la Mutualité".

Dans un contexte d'aggravation du déficit de la Sécurité sociale, dont les recettes sont grevées par la baisse de la masse salariale, M. Sarkozy a affirmé qu'à l'avenir "les régimes de base ne pourront pas tout financer".

"Je souhaite que soient confiées de nouvelles responsabilités aux organismes complémentaires", a expliqué le chef de l'Etat, qui confirme ainsi son intention de parvenir à un désengagement progressif de l'assurance-maladie obligatoire, notamment sur les maladies chroniques.

Alors que jusqu'ici les mutuelles étaient en situation de "payeur aveugle", sans droit de regard sur la qualité des soins qu'elles remboursent, elles revendiquent aujourd'hui une place de premier plan dans la gestion du système de santé.

"Nous avons la volonté de faire bouger les choses, notamment sur les maladies chroniques, explique le président de la Mutualité, Jean-Pierre Davant. Ce que l'assurance-maladie obligatoire n'arrive pas à faire, nous pouvons l'assumer."

Le mouvement mutualiste propose ainsi aux pouvoirs publics d'avoir la possibilité de contractualiser avec des professionnels de santé, afin d'offrir à ses adhérents des filières de santé spécifique, aux tarifs opposables, sans dépassements d'honoraires.

"EXPÉRIMENTATIONS"

M. Sarkozy a immédiatement saisi la balle au bond. L'homme des franchises médicales et de l'instauration d'une taxe sur le chiffre d'affaires des organismes complémentaires – deux mesures fortement dénoncées par la Mutualité française – juge bienvenu le transfert d'une partie des compétences de l'assurance-maladie obligatoire vers les complémentaires.

"La solidarité nationale, financée par des prélèvements obligatoires, continuera de remplir sa mission, a prédit le chef de l'Etat. Mais à ses côtés, d'autres formes de protection sont appelées à se développer."

Le président de la République a donc donné son feu vert pour que des "expérimentations" soient lancées sur une meilleure prise en charge des maladies chroniques par la Mutualité.

Il a par ailleurs demandé que les assureurs complémentaires soient associés aux discussions entre l'assurance-maladie et les professionnels de santé, dans le secteur des soins dentaires et optiques.

Enfin, il a insisté pour que le "secteur optionnel", un nouveau système de tarification de la consultation des médecins, censé encadrer les dépassements d'honoraires, voit le jour.

Constatant l'impasse des discussions entre l'assurance-maladie, les organismes complémentaires et les professionnels de santé sur ce sujet, il a assuré que "le législateur pourrait reprendre la main" sur le dossier. C'est-à-dire imposer le secteur optionnel dès cet automne, à la faveur du prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

Cécile Prieur