mercredi 21 septembre 2011

Les députés se penchent sur l'activité des visiteurs médicaux

Le Monde, 20 septembre 2011

Mardi 20 septembre, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale examine pour la deuxième fois le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. Une loi qui a pour objectif "de redonner confiance aux Français dans notre système du médicament", selon les dires de son instigateur, le ministre de la santé, Xavier Bertrand.

Grâce à ce texte, présenté comme une "refonte" du système, le gouvernement entend réformer la profession des visiteurs médicaux. Ces représentants des laboratoires pharmaceutiques vont à la rencontre les médecins pour vanter les mérites des derniers produits mis sur le marché par leur société, et accessoirement les vendre.

Si le texte est voté en l'état, les visiteurs médicaux devront s'adresser à un collège de médecins et non plus à un seul praticien, en face à face. Une mesure expérimentale, qui ne sera tentée qu'en milieu hospitalier pendant deux ans, les médecins de ville n'étant pas concernés pour le moment.

UNE MESURE "INAPPLICABLE"

"Inapplicable", tonne Catherine Lemorton, qui suit le projet de loi pour le compte du groupe socialiste, radical et citoyen à l'Assemblée nationale. La député, également pharmacienne à Toulouse, s'interroge et pointe du doigt une méconnaissance du milieu hospitalier : les médecins et les spécialistes sont rarement disponibles tous ensemble au même moment, affirme-t-elle en substance.

Jean-Luc Préel, député Nouveau Centre et par ailleurs ancien chef de service hospitalier, ne dit pas autre chose. "L'idée de visites médicales à l'hôpital devant plusieurs professionnels de santé qui, tous, manquent de temps, me laisse dubitatif. Comment s'organiseront-elles ?", a-t-il interrogé en commission. Réponse du ministre Xavier Bertrand : "La suppression du cadre individuel peut soulever des difficultés pour les petits hôpitaux locaux, mais on ne peut pas accepter le maintien du statu quo. La visite médicale, telle que nous l'avons connue, a vécu."

Si Catherine Lemorton comprend la logique du gouvernement – les visites collectives doivent permettre de réduire les abus –, elle regrette que le débat se focalise sur cette profession. "Ils ne sont qu'un maillon de la chaîne. Après tout, ils ne sont que les messagers d'une direction. En faire des boucs émissaires serait vraiment malhonnête", insiste-t-elle, avant de rappeler la responsabilité des médecins, parfois trop influençables.

DE MOINS EN MOINS DE VISITEURS MÉDICAUX

Contrairement à ce que préconise l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), les deux élus ne militent pas pour la disparition pure et simple des visiteurs médicaux. "Quel gouvernement prendrait la responsabilité sociale de provoquer le licenciement de 18 000 personnes ?", demande Catherine Lemorton. Les reconvertir en agents publics de l'information sur le médicament ? "L'État n'en a pas les moyens", répond-elle.

"Pourquoi ne pas imaginer que la Haute Autorité de santé explique aux médecins la marche à suivre en développant les logiciels de prescriptions ?", demande Jean-Luc Préel. Autre solution avancée par l'élue socialiste : "Il faudrait utiliser cette force de frappe pour faire remonter auprès des centres régionaux de pharmacovigilance les effets secondaires et indésirables des médicaments."

Problème : cela reviendrait à demander aux visiteurs médicaux de "dénoncer" leurs employeurs. Pas sûr qu'ils soient d'accord. Réforme ou pas, le nombre de visiteurs médicaux décroît inexorablement. Ils étaient 25 000 en 2004, ils ne sont plus que 18 000 en 2011. En cause, la multiplication des médicaments génériques, la signature d'une charte encadrant leur profession et les fusions entre laboratoires.

Et l'hémorragie n'est pas finie. Après avoir licencié quelque 700 personnes en 2008, principalement des visiteurs médicaux, le laboratoire Pfizer promet, mardi, les licenciements de 225 personnes supplémentaires en France. Sa justification ? La réforme de la visite médicale défendue par le gouvernement.

Thomas Monnerais

dimanche 18 septembre 2011

Dépenses de santé : plus de médicaments déremboursés

Le Figaro, 18 septembre 2011

Les grandes lignes du budget 2012 de la Sécurité sociale seront présentées jeudi 21 septembre 2011.

Réduire le «trou» de 95,7 milliards d'euros de l'État demandera du temps. Prendre de nouvelles mesures sur les retraites donnerait l'impression que la réforme de 2010 était insuffisante. Et le gouvernement n'a pas la main sur les finances des collectivités locales.

Pour donner un signal visible de baisse des déficits publics avant la présidentielle, le gouvernement a donc une priorité: l'Assurance-maladie. Son trou sera «divisé par deux entre 2010 et 2012», a déjà promis la ministre du Budget et des Comptes publics, Valérie Pécresse. Ce qui devrait le réduire à moins de 6 milliards d'euros.

Pour cela, l'Assurance-maladie bénéficiera de recettes supplémentaires: elle récupérera une bonne partie des 10 milliards de prélèvements supplémentaires annoncés, fin août 2011, par François Fillon. Mais elle devra aussi faire un effort sur ses dépenses. L'objectif sera de contenir leur hausse à 2,8% (contre 2,9% cette année), ce qui suppose 2,2 milliards d'économies par rapport à la progression spontanée.

La répartition de ces économies sera présentée jeudi par le gouvernement, qui dévoilera les grandes lignes du projet de budget 2012 de la Sécurité sociale, en même temps que les dernières prévisions de déficit, qui sera inférieur à 18 milliards d'euros pour 2011. C'est l'industrie du médicament qui devrait être la première mise à contribution.

Les baisses de prix, qui ces dernières années tournaient autour de 500 millions d'euros par an, seront plus proches cette année de 650-700 millions, selon les notifications déjà adressées aux laboratoires. S'y ajouteront des déremboursements.

Alors que, par le passé, il avait souvent transigé, inventant notamment une «vignette orange» remboursée à 15 % par la Sécu, le gouvernement ne devrait plus hésiter, cette fois, à dérembourser complètement les médicaments inefficaces.

La mise en garde des laboratoires

Depuis l'affaire Mediator, les Français n'ont plus une foi absolue dans les médicaments, ce qui devrait rendre moins difficile une telle mesure.

Avantage annexe: tout comme les baisses de prix, les exclusions du remboursement font également réaliser des économies aux complémentaires, car elles aussi sortent les médicaments concernés de la liste des produits qu'elles prennent en charge. Or le gouvernement veut se réconcilier avec les complémentaires, après leur avoir infligé un milliard d'euros de taxe supplémentaire.

Le Leem, la fédération professionnelle des laboratoires, souligne que ces mesures coïncideront en 2012 avec l'expiration de nombreux brevets, représentant selon ses estimations 1,2 milliard de chiffre d'affaires, contre une moyenne de 700 à 800 millions les années précédentes.

En ajoutant à cela le projet de loi sur le médicament rédigé par le ministre Xavier Bertrand après le scandale du Mediator, le Leem craint l'an prochain un recul -inédit- du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique, qui pourrait atteindre 1% ou 2%.

En outre, les prélèvements devraient augmenter: en vue, un relèvement de la taxe spéciale sur le chiffre d'affaire des laboratoires (actuellement fixée à 1%, elle pourrait revenir vers son niveau d'autrefois, soit 1,7 %) et une contribution nouvelle pour financer indirectement la formation continue des médecins, via l'État.

Le Leem met en garde contre de nouvelles réductions d'effectifs, notamment chez les visiteurs médicaux, et contre un «climat de défiance» qui pousserait les grands laboratoires internationaux à préférer d'autres pays pour investir dans la recherche ou la production.

vendredi 16 septembre 2011

Attirer les futurs praticiens vers les déserts médicaux

Le Figaro, Septembre 2011

Le gouvernement veut faire plus que les 148 contrats signés l'an dernier.

Face aux déserts médicaux, le gouvernement a renoncé à toute mesure obligeant les médecins libéraux à travailler en zone sous-dense - y compris à celles qu'il avait fait voter au début du quinquennat. Le risque est trop grand de décourager un peu plus les vocations, de généralistes notamment, considère-t-il.

Face aux déserts médicaux, le gouvernement a renoncé à toute mesure obligeant les praticiens libéraux à aller travailler en zone sous-dense, y compris aux mesures qu'il avait fait voter au début du quinquennat. Le risque est fort, estime-t-il, de dissuader les vocations, notamment de généralistes. Il s'attache désormais à promouvoir les mesures incitatives récentes.

La secrétaire d'État à la Santé, Nora Berra, se rend aujourd'hui à la faculté de médecine de Dijon pour y vanter le «contrat d'engagement de service public» , innovation de la loi Bachelot de 2009.

Son principe : un étudiant en médecine peut recevoir, dès sa deuxième année d'études, une allocation de 1 200 euros bruts mensuels jusqu'à la fin de son cursus.

En échange, il s'engage à s'installer dans une zone manquant de médecins (campagne ou banlieue, le plus souvent) et à y exercer pendant une durée équivalente.

Pour 2010-2011, année universitaire d'entrée en vigueur du dispositif, 400 contrats étaient budgétés. Au final, 148 ont été signés.

«C'est un bon score, sachant que la mesure a été lancée tard, juste avant l'été 2010. L'élan est donné», estime Nora Berra. Les volontaires sont, aux deux tiers, des étudiants en début de parcours - plutôt que des externes ou des internes, qui reçoivent déjà une rémunération de l'hôpital.

«Ne plus avoir à se préoccuper du financement de leurs études leur permet de se concentrer sur leur projet professionnel, poursuit la secrétaire d'État.

Et souvent de se rendre compte que travailler dans ces zones répond à leurs aspirations : qualité de vie, exercice en groupe, temps partiel auquel aspirent beaucoup de femmes, et l'idée d'être un vrai médecin de famille.»

Autre avantage, même si ce n'est pas l'objectif premier du dispositif : «Il encouragera les jeunes issus de familles modestes à s'engager dans un cursus long, donc coûteux.»

Communication à renforcer

Le succès de ce contrat est pourtant très inégal : 93 % des contrats disponibles ont trouvé preneur en Bourgogne, 79 % en Picardie, 67 % en Limousin et dans le Centre, mais 10 % en Bretagne et aucun en Languedoc-Roussillon.

Pour Nora Berra, ces écarts s'expliquent par la méconnaissance du dispositif : certaines agences régionales de santé l'ont moins promu que d'autres. La communication va être renforcée.

Un autre frein vient d'être levé : les signataires ont désormais la certitude d'être affectés dans leur région d'études, et ne courront donc plus le risque - assez théorique - de se voir imposer une installation à l'autre bout de la France, sauf à exprimer eux-mêmes ce souhait.

En 2011-2012, 400 nouveaux contrats seront proposés, et autant les années suivantes. Le coût pour l'État culminera à 29 millions d'euros par an en 2015.

jeudi 15 septembre 2011

Le nouveau projet de loi sur le #medicament

#bigphrmas #labos

Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, devant la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, le 13 septembre 2011

- Le projet de loi sur le médicament constitue "une réforme en profondeur", qui répond à "un seul et unique objectif : protéger le patient".
- "La réforme a une ambition importante : redonner confiance aux Français dans notre système du médicament.".
- "Il ne s'agit pas d'une loi comme les autres, elle fait suite au scandale du Mediator. Elle concerne potentiellement chacun de nos concitoyens.".
- "Nous avons voulu une réforme en profondeur, qui ait du sens, dans un seul et unique objectif : protéger le patient.", a-t-il ajouté.
- Cette réforme, "qui refonde le système de sécurité sanitaire des produits de santé", "est un tout".
- "Il y a la loi, il y a les décrets, il y a le fonctionnement de l'Afssaps et il y a aussi la dimension européenne".
- "J'aurai à coeur de prendre des amendements".
- Il a également exprimé le souhait que soit décidée, "dès maintenant, une évaluation complète de cette loi et de son application", dans deux ou trois ans.
- Le ministre a par ailleurs affirmé travailler à "une nouvelle loi sur les droits des patients", en relais de la loi Kouchner de 2002.

Références

- Un nouveau projet de loi sur le médicament, Le Point, 13 septembre 2011

Les répliques sans fin de l'affaire du #Mediator...

L’affaire du Mediator n’en finit plus de créer des répliques. Elle jette une lumière crue sur les relations incestueuses entre l'industrie pharmaceutique, les agences de régulation et les élites hospitalo-universitaire françaises.

L’affaire Griscelli est la dernière en date de ces répliques. Elle a créé une émotion considérable dans la communauté médicale française.

HAS et conflits d'intérêts

Jean-Luc HAROUSSEAU, le président de la HAS, lors de sa prise de fonction le 31 janvier 2011, a rendu une déclaration d’intérêt vierge. Le 21 février 2011, la veille de la publication d’un article du Canard et d'un reportage de France Culture, Jean-Luc Harousseau publiait en annexes adressées aux présidents des Commissions des affaires sociales du Sénat et de l’Assemblée nationale, la liste de ses liens d’intérêts personnels et institutionnels des trois dernières années avec l’industrie et leurs montants : en tout plus de 10 millions d’euros de rémunération ! (Source FORMINDEP).

Développements 

Pour mémoire, Le Figaro publie le 13 septembre 2011 des écoutes téléphoniques entre Claude Griscelli et Jean-Philippe Seta, directeur opérationnel de Servier. Les deux hommes sont manifestement trés proches et se tutoient. Ils discutent du rapport du Sénat sur l’affaire du Mediator.

Claude Griscelli dit: «Je me suis fichu des choses nulles, mais bien sûr j’ai regardé des phrases clés qui concernaient la responsabilité de Servier… Et donc j’ai fait changer pas mal de choses». Seta réagit: «Décidément, je n’ai même pas besoin de te donner des conseils, tu anticipes, c’est parfait».


Selon des écoutes téléphoniques, l'intervention de M.Griscelli aurait eu pour effet de minimiser les responsabilités du laboratoire dans le document final. 

Le sénateur et président de la mission d'information sur le Mediator, François Autain (divers gauche), a demandé jeudi 15 septembre 2011 au président du Sénat, Gérard Larcher, de saisir le comité de déontologie parlementaire après avoir appris que Marie-Thérèse Hermange, rapporteur (UMP) de la mission, a consulté Claude Griscelli, professeur de médecine et ami du directeur exécutif de Servier, au moment de la rédaction de son rapport sur le système du médicament. 

Même si les modifications "revêtent, par rapport à l'ensemble du contenu du texte, une importance marginale", précise M. Autain, cette affaire "jette le discrédit non seulement sur un travail que certains considéraient jusque-là comme exemplaire, mais aussi sur notre institution".

Liens

- L’étonnante conception de la HAS et de l’Afssaps, formindep

- Douste-Blazy, Bapt, Harousseau : Touchez pas au grisbi des médecins politiques!, par Pharmaleaks, agoravox.fr, 24 juin 2011

- J-L Harousseau : " Nous devons montrer l’exemple", lepharamacien.fr, juin 2011

Références

Le président de la mission d'information sur le Mediator interpelle le président du Sénat, Le Monde, 17 septembre 2011

- Scandale Mediator - Claude Griscelli : "Je n'ai eu aucun rôle dans ce rapport", Le Point, 14 septembre 2011

- Mediator : le professeur Griscelli se défend d’avoir fait modifier le rapport sénatorial, France-Info, 14 septembre 2011

- Mediator: la chute d'un grand pédiatre, La plume et le bistouri, 14 septembre 2011

- Mediator : comment Servier a corrigé le rapport du Sénat, Le Figaro, 14 septembre 2009

- Mediator : des auditions accablent le laboratoire Servier, Le Figaro, 5 septembre 2011

- Mediator : ce que Jacques Servier a déclaré aux parlementaires, Le Figaro, 3 mars 2011

- Deux missions parlementaires sur le Mediator, Le Figaro, 15 février 2011

mercredi 14 septembre 2011

Les Français dépensent 2700 euros par an en soins

Le Figaro, 14 septembre 2011

Les ménages en paient directement 9,4%, ce qui reste peu comparé à nos voisins.

En cinq ans, 25 milliards de plus ! La «consommation de soins et biens médicaux» a atteint 175 milliards d'euros l'an dernier, selon la Commission des comptes de la santé.

Ce montant regroupe soins hospitaliers (une petite moitié du total), soins de ville (un quart - 25%), médicaments (un cinquième - 20%), prothèses, seringues et autres pansements, et transports de malades. La dépense atteint ainsi 2698 euros par habitant.

Si l'on y ajoute prise en charge des personnes dépendantes, arrêts maladie ou maternité, prévention, recherche, formation des professionnels de santé et coûts de gestion, l'enveloppe atteint 234,1 milliards, soit 3609 euros par habitant.

La part financée par la «Sécu» reste stable.

vendredi 9 septembre 2011

Déficit historique pour la Sécurité sociale

Le Point.fr - 08/09/2011

La Cour des Comptes s'alarme, dans un rapport publié jeudi, du déficit historique atteint en 2010 par les comptes sociaux (Sécu et Fonds de solidarité vieillesse / FSV) à près de 30 milliards d'euros, un niveau record pas seulement dû à la crise.

"Jamais le déficit de la Sécurité sociale n'a atteint un niveau aussi élevé qu'en 2010. A 29,8 milliards le déficit cumulé des régimes de base et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) a un caractère historique. Il a plus que triplé en deux ans", souligne le rapport annuel de la Cour sur la Sécurité sociale.

"Le niveau exceptionnellement élevé des déficits ne s'explique que partiellement par la crise économique. Moins de la moitié de celui du régime général provient de la faiblesse de la conjoncture", selon la Cour qui précise que sur le 1,2 point de Produit Intérieur Brut (PIB) qu'a représenté en 2010 le déficit du régime général, les "facteurs structurels" ont compté pour 0,7 point.

Selon la Cour, les déficits se sont aggravés en 2010 dans toutes les branches de la Sécu (maladie, famille, retraites, accidents du travail/maladies professionnelles).

"Anomalie" de la dette sociale (Cour des Comptes)

De son côté le FSV (fonds de solidarité vieillesse), qui verse le minimum vieillesse pour les personnes âgées ne touchant pas de retraites, est "chroniquement sous-financé".

De plus, pour la branche vieillesse, les magistrats de la rue Cambon tirent la sonnette d'alarme à propos du régime des exploitants agricoles dont le déficit, qui a dû être financé par recours à un emprunt bancaire, "est également très préoccupant".

L'accumulation des déficits, d'année en année, fait gonfler la dette sociale qui a atteint un total de 136,2 milliards fin 2010.

Cette dette sociale "représente en elle-même une anomalie", estime la Cour qui constate que "aucun de nos grands voisins européens n'accepte de déséquilibres durables de sa protection sociale".

La Sécu «droguée» à la dette, selon la Cour des comptes

La Sécu «droguée» à la dette, s'alarme Migaud, Le Figaro, 9 septembre 2011 Le rapport annuel de la Cour des comptes insiste une nouvelle fois sur la nécessité de faire des économies. La crise, certes, mais pas seulement. La Sécu a enregistré l'an dernier un déficit historique frôlant 30 milliards d'euros (y compris le Fonds de solidarité vieillesse), a rappelé jeudi la Cour des comptes. La crise l'a privée d'une partie de ses recettes mais «n'explique qu'un peu moins de la moitié du déficit global», estime Didier Migaud. «Notre Sécurité sociale est en déficit à peu près chaque année depuis trente ans», souligne le premier président de la Cour. De quoi «entretenir une spirale de la dette, particulièrement dangereuse pour la légitimité et la pérennité même de notre protection sociale». La dette sociale atteignait 136 milliards fin 2010. Un «poison», une «drogue» qui retarde les réformes nécessaires, prévient Didier Migaud. Pour apurer la situation, la Cour des comptes préconise que l'on transfère chaque année le déficit constaté à la Caisse d'amortissement de la dette sociale. Pour que ne soit pas prolongée la durée de vie de la Cades (censée disparaître en 2025), chaque transfert devra s'accompagner d'une hausse de sa principale ressource, la CRDS. Ce que le gouvernement a toujours refusé jusqu'ici. Au-delà de cette piste, qui éviterait de reporter sans cesse davantage le poids de nos dépenses sociales sur nos enfants, la Sécu doit se «désintoxiquer» de la dette en agissant sur ses dépenses, prône la Cour. • Hôpitaux Pour un acte identique, les hôpitaux publics reçoivent plus de la Sécu que les cliniques privées. Ces tarifs doivent être alignés en 2018. La Cour recommande une préparation plus méthodique à cette échéance inscrite dans la loi -mais déjà reportée une fois- car elle représente 7 milliards d'économies par an à trouver côté public. Les hôpitaux, CHU en tête, justifient ces tarifs plus élevés par des missions spécifiques (urgences, enseignement, recherche…). Mais ils reçoivent aussi des enveloppes forfaitaires pour assurer ces missions, dont les montants ne sont pas justifiés par une analyse précise des coûts. Les actes pratiqués uniquement dans les CHU représentent 5,5% seulement de leur activité de médecine, chirurgie et obstétrique! De l'eau au moulin de la fédération des cliniques (FHP-MCO), qui vient de porter plainte sur ce thème contre la France à Bruxelles, pour distorsion de concurrence. • Complémentaires santé Les employeurs ne paient pas de charges sociales lorsqu'ils cofinancent une complémentaire santé à leurs salariés. Une niche de 3,2 milliards qui bénéficie surtout aux salariés des grandes entreprises, dont la paie est plus élevée que celle des employés de PME. Qui plus est, les contrats collectifs souscrits par le biais de l'employeur couvrent mieux que les contrats individuels. La Cour s'interroge donc sur la nécessité de réorienter cette aide. Elle relève aussi que la CMU rembourse mieux les soins que les contrats souscrits par les bénéficiaires -un peu «moins pauvres»- de l'aide à la complémentaire santé (ACS), qui eux-mêmes offrent plus de garanties que les contrats moyens. Elle réclame des études sur ces effets de seuil et sur l'éventuelle surconsommation de soins des bénéficiaires de la CMU et de l'ACS. • Productivité des caisses Les frais de gestion représentent 3% des dépenses de la Sécu. C'est peu en proportion, beaucoup en valeur absolue: 10 milliards. Didier Migaud estime qu'un milliard peut être économisé en quelques années. Les réductions d'effectifs (en 5 ans, 6.500 postes) doivent être poursuivies avec plus de mutualisation des moyens et de souplesse. Bien que de droit privé, le statut des agents des caisses est plus rigide que celui des fonctionnaires: aucune mobilité géographique ou fonctionnelle ne peut leur être imposée. Résultat, quand ici une caisse a trop d'informaticiens, ailleurs une autre en embauche en CDD. La Cour des comptes appelle à changer ces règles à la prochaine révision de ce statut, en 2013.

jeudi 8 septembre 2011

Des mesures anti-déficits pour la Sécurité sociale

Le Figaro, 8 septembre 2011

Pour le président de la Cour des comptes, Didier Migaud, le retour de la croissance ne permettra pas de retrouver l'équilibre à court terme des comptes de la Sécu. La Cour cible les niches sociales dont le coût pour les finances publiques atteint selon elle 70 milliards.

La Cour des comptes a prôné ce mercredi des mesures pour redresser les comptes de la Sécurité sociale, en soulignant que le retour de la croissance ne permettrait pas de retrouver l'équilibre à court terme.

Son rapport annuel sur la Sécurité sociale, publié mercredi, attire aussi l'attention sur les dépenses hospitalières, qualifiant de trop lents les efforts de redressement des établissements en difficulté.

Alors que le déficit de la Sécurité sociale doit atteindre en 2010 un niveau record - évalué à 27 milliards d'euros pour le régime général (salariés du privé) -, «le retour indispensable à l'équilibre des comptes exige des réformes à effet rapide mais aussi structurelles», estime la Cour.

Niches sociales

Il passe d'abord par une progression des ressources, pour laquelle «priorité doit être donnée à la remise en cause des niches sociales». Les niches sociales désignent l'ensemble des exonérations, des réductions ou autres abattements qui s'appliquent aux cotisations et contributions sociales. Elles créent un manque à gagner pour la Sécurité sociale et pour l'Etat (qui compense en grande partie les pertes de la Sécurité sociale).

Pour la Cour des comptes, l'impact des ces dispositifs se situe entre 67 et 73 milliards d'euros pour les finances publiques, en additionnant les exonérations de cotisations et leur compensation. Soit bien plus que l'impact d'environ 40 milliards évoqué dans les rapports officiels.

Même si elle salue les efforts de réduction de ces niches ces dernières années, en tenant compte des mesures annoncées dans la réforme des retraites, la Cour exhorte le gouvernement à les «prolonger avec plus de vigueur».

Dépenses

Côte dépenses, les pistes d'économie suggérées concernent d'abord les hôpitaux. La Cour estime que les établissements doivent «accroître la productivité et adopter des mesures d'organisation et de restructuration». «Les efforts de redressement paraissent lents», juge-t-elle.

La Cour des comptes se préoccupe aussi de l'accès aux soins, jugé insuffisant dans les domaines de l'imagerie médicale (scanners, IRM) et des soins dentaires. Elle relève notamment les difficultés croissantes rencontrées par les patients face aux dépassements d'honoraires non régulés des dentistes.

Invalidité

Le rapport annuel s'est également penché sur les mécanismes de prise en charge de l'invalidité, de l'inaptitude au travail et du handicap. Conclusion: le système, alors qu'il s'adresse à des personnes fragilisées, est «illisible».

La Cour des comptes constate notamment la multiplicité des guichets, qui n'ont pas les mêmes méthodes pour évaluer l'incapacité.

mardi 5 juillet 2011

Les pistes pour réduire les dépenses de santé

Le Figaro, 5 juillet 2010

La Caisse nationale de l'Assurance-maladie (CNAM) va faire 21 propositions au gouvernement pour réaliser les 2,2 milliards d'euros en 2011.

L'Assurance-maladie fera 21 propositions jeudi au gouvernement pour «accroître la qualité des soins et l'efficience des dépenses de santé». Objectif ? Réaliser les 2,2 milliards d'économies en 2011 préconisées par ­Nicolas Sarkozy.

Au menu : «développer l'information de l'assuré et la prévention, faire évoluer la prise en charge des maladies chroniques» comme les pathologies cardiovasculaires ou mettre en œuvre «des modes de prise en charge plus souples» comme d'effectuer à domicile les séances de chimiothérapie.

La Cnam proposera aussi de «développer les référentiels, notamment dans les domaines de la rééducation et des arrêts de travail» pour réduire les écarts en matière de prescriptions médicamenteuses.

Enfin, l'Assurance-maladie préconisera également pour optimiser les dépenses, de «restructurer la tarification de la biologie», d'homogénéiser «les tarifs des médicaments dont l'efficacité thérapeutique est équivalente» ou de «plafonner les dépassements sur les actes d'orthodontie».

mardi 14 juin 2011

Le mouvement des médecins à diplômes étrangers

Le Syndicat National des Praticiens à Diplôme Hors Union Européenne (Médecins, Pharmaciens, Chirurgiens-dentistes et Sages-femmes) (SNPADHUE) appelle à manifester le 15 juin 2011 devant le Ministère de la Santé.

Références

- Une manifestation le 15 juin de médecins à diplôme étranger, lequotidiendumedecin.fr, 8 juin 2011

- Manifestation des médecins étrangers le 15 juin, Buzz Santé, 8 juin 2011

- « Sans nous, l’hôpital ne pourrait pas fonctionner », Le Parisien, 24 mai 2011

lundi 13 juin 2011

L'inquiétant vieillissement des médecins français

Le Figaro, 13 juin 2011

Le conseil national de l'Ordre s'alarme d'une relève insuffisante, notamment chez les généralistes, et d'une répartition géographique toujours aussi inégale.

Un équilibre précaire

La France comptait au 1er janvier 199 987 médecins en activité régulière (c'est-à-dire sans compter les 9 903 remplaçants), dont 193 828 en Métropole, selon l'édition annuelle de l'Atlas de la démographie médicale, que publie mardi le conseil national de l'Ordre. Ce chiffre confirme la stabilité observée ces dernières années (- 0,03 % en 2010).

Les effectifs restent à des niveaux records, après des décennies de hausse ininterrompue : les «toubibs» étaient presque deux fois moins nombreux à la fin des années 1970. Pour autant, les raisons de s'inquiéter n'ont pas disparu.

D'abord, la densité médicale recule (306,7 médecins pour 100 000 habitants, contre 308,8 l'année précédente), compte tenu de la hausse de la population.

Ensuite, la répartition des médecins sur le territoire demeure très inégale. Le palmarès reste le même, et les régions les mieux loties (Paca, Ile-de-France) comptent 1,5 fois plus de médecins que les plus démunies (Picardie, Centre, Haute-Normandie).

Sans même compter les différences, au sein de chacune de ces régions, entre les villes universitaires, où les jeunes s'installent volontiers à la fin de leurs études, et les campagnes et banlieues, où les déserts médicaux sont souvent déjà une réalité.

Enfin, les médecins vieillissent. Leur moyenne d'âge est passée de 50 à 51,4 ans entre 2009 et 2010. Les plus de 55 ans représentent 42,9 % des troupes. Le recul du nombre de médecins, prédit depuis longtemps, semble donc plus inéluctable que jamais.

L'Ordre des médecins s'alarme en outre de la faible proportion de jeunes médecins qui choisissent l'exercice libéral : seulement 9,4 % des nouveaux inscrits de l'année - et encore cette proportion marque-t-elle un léger rebondissement.

Quand il s'agit de généralistes qui choisissent le salariat (industrie, médecine scolaire, maison de retraite, centres de santé…), ce sont autant de personnes qui n'assurent pas les gardes de nuit ou de week-end.

Paperasse, horaires lourds et risque de clientélisme

Pour creuser ce phénomène, l'Ordre a sondé ces rares jeunes volontaires pour la médecine libérale. Un tiers des 1 211 installés de l'année ont répondu.

Premier enseignement : ils vivent en couple à 86 % et ont des enfants dans les deux tiers des cas. Ce qui montre bien la difficulté d'envisager toute mesure les obligeant à s'installer en tel ou tel endroit du territoire, si aucun emploi n'y est disponible pour le conjoint et si les services de proximité (supermarchés, poste et surtout école) y ont fermé. Deuxième enseignement : surprise, 95 % d'entre eux se disent satisfaits, assez satisfaits ou très satisfaits de leur exercice ! Ils ont choisi le mode libéral pour trois grandes raisons : «l'indépendance», «le contact privilégié avec la patientèle», et l'autonomie dans la «gestion du temps». Au final, 86 % d'entre eux «recommanderaient à un jeune confrère d'exercer en secteur libéral».

Cet enthousiasme n'empêche pas de relever de multiples contraintes : paperasse en tout genre, relations tendues avec l'Assurance-maladie, complexité de la gestion comptable, exigences des patients (médicaments, examens complémentaires, arrêts de travail) qui poussent au «clientélisme»…

Ces mêmes mots - et ces mêmes maux - ressortent de la deuxième enquête thématique menée cette année par l'Ordre : les 903 médecins qui ont «dévissé leur plaque» avant l'âge de la retraite ont eux aussi été interrogés, et un tiers a répondu. Ils déplorent, en outre, les «charges financières trop lourdes» et surtout le «volume d'activité» trop élevé, «pas compatible avec une vie de famille» . Pour y échapper, ils poursuivent leur activité à l'hôpital, en salariat, voire redeviennent remplaçants.

mardi 17 mai 2011

Très chers médecins spécialistes

Libération, 18 mai 2011

Alors qu’à droite comme à gauche, on s’alarme sur les inégalités de santé, rien n’est fait pour encadrer les dépassements d’honoraires en médecine de ville, qui touchent singulièrement ceux qui ont des petites mutuelles.

Hier, l’assurance-maladie a encore tiré la sonnette d’alarme sur leur forte progression, pointant particulièrement le cas des spécialistes. Les chiffres sont sans appel.

En 2010, un médecin sur quatre exerce désormais en secteur à honoraires libres, dit «secteur 2». Cette proportion monte à plus de 4 sur 10 parmi les spécialistes. 85 % des chirurgiens sont en secteur 2 ; 50 % des ORL, des ophtalmologistes ou des gynécologues. Au plan géographique, les dépassements sont davantage constatés dans la région parisienne, dans les Alpes-Maritimes et le Rhône.

Enfin, le niveau des dépassements augmente fortement : en trente ans, il a plus que doublé. En 2010, le montant des honoraires remboursables s’est élevé à 18,4 milliards d’euros et les dépassements à 2,5 milliards d’euros.

E. F.

"Développement excessif" des honoraires libres chez les médecins spécialistes

Le Monde, 17 mai 2011

De plus en plus de médecins choisissent d'exercer en honoraires libres, et les taux de dépassement sont de plus en plus élevés. La sonnette d'alarme a beau avoir été tirée à maintes reprises sur les freins à l'accès aux soins que constituent les dépassements d'honoraires, ce mode de rémunération s'ancre profondément dans le système de santé français, démontre une étude présentée mardi 17 mai 2011 par l'assurance-maladie, qui s'en inquiète.

Désormais, les nouveaux médecins qui s'installent sont bien plus nombreux à décider de pratiquer des dépassements.

En 2010, parmi les spécialistes, six sur dix ont fait ce choix, contre "seulement" quatre sur dix pour ceux déjà en exercice. Ce qui laisse présager un renforcement, à l'avenir, du nombre de médecins inscrits en "secteur 2", c'est-à-dire ceux qui pratiquent des honoraires libres et non pas les tarifs de la Sécu.

Le différentiel est très élevé chez les anesthésistes, avec 66% des nouveaux installés optant pour le secteur 2, contre 34% pour l'ensemble de la spécialité.

L'an dernier, 82% des installations de gynécologues se sont faites en secteur 2, 84% pour les ORL, 63% pour les ophtalmologues.

Lancé en 1980, pour éviter à la Sécurité sociale d'augmenter les tarifs des consultations tout en permettant une hausse de la rémunération des médecins, le secteur 2 a remporté un tel succès que face à la difficulté, déjà, de trouver un praticien au tarif de base, il a été décidé d'en limiter l'accès en 1990.

Le secteur a alors été réservé aux plus diplômés (anciens assistants des hôpitaux, chefs de clinique, praticiens hospitaliers).

2,5 MILLIARDS D'EUROS EN 2010

Mais vingt ans plus tard, après une baisse des effectifs de praticiens en tarif libre, ce sont désormais des niveaux de 1990, voire bien au-dessus, que l'on retrouve dans certaines spécialités, comme les chirurgiens, les anesthésistes ou les gynécologues.

Si, aujourd'hui, 24% des médecins pratiquent des dépassements d'honoraires, contre 31% en 1990, chez les généralistes, qui n'ont plus accès au secteur 2, on n'en compte plus que 11%.

En revanche, chez les spécialistes, les effectifs en honoraires libres, après être redescendus à 37% en 2000, sont remontés à 41% en 2010. Soit quasiment le même niveau qu'avant la réforme du secteur 2.

La barre des 50% est souvent dépassée, par exemple chez les ORL, les ophtalmologues ou les gynécologues, et surtout les chirurgiens, qui atteignent désormais les 85% !

Autre tendance lourde relevée par l'assurance-maladie : l'augmentation du niveau des dépassements d'honoraires, qui ont représenté 2,5 milliards d'euros en 2010, dont 2,1 milliards pour les spécialistes.

Pour ceux-ci, entre 1985 et aujourd'hui, le taux de dépassement (rapporté aux tarifs de la Sécurité sociale), a été multiplié par plus de deux, passant de 23% à 54%. Soit une facture à 154 euros pour un acte remboursé 100 euros.

Depuis 2005, la hausse se tasse, mais elle est continue. Les taux sont les plus élevés chez les pédiatres (64%), les ophtalmologues (60%), les chirurgiens (56%) et surtout les obstétriciens (83%).

MÉDECINE À DEUX VITESSES

Les régions sont très diversement touchées par ce double phénomène, les zones où la population est la plus aisée étant cependant principalement concernées.

Ainsi en région parisienne, 90% des spécialistes pratiquent des dépassements, et leurs taux atteignent 150% des tarifs de la Sécu ! Même si les complémentaires de santé peuvent prendre les dépassements en charge, il faut savoir que 40% des contrats les excluent, et que 7% des Français n'ont pas de mutuelle.

L'essor des dépassements favorise donc bien la médecine à deux vitesses. Les médecins, qui préfèrent parler de "compléments d'honoraires", refusent cependant d'être jugés responsables, rappelant à l'envi que la hausse est due au fait que les tarifs de base, si peu augmentés par l'Assurance-maladie, ne permettent plus d'exercer.

Le phénomène, cependant, inquiète certains syndicats.

"Ce n'est plus supportable pour la population, et c'est un vrai problème pour les généralistes, qui ne trouvent plus facilement des spécialistes à un tarif acceptable par leurs patients, relève Claude Leicher, pour MG France. Les dépassements étaient auparavant un problème pour une petite partie de la population, mais aujourd'hui, même des personnes gagnant leur vie peuvent ne pas pouvoir assurer, ponctuellement, une dépense très élevée."

Face à ce "développement excessif" du secteur 2, l'assurance-maladie appelle à une "réforme structurelle du système". Depuis trente ans, aucun gouvernement n'a fait de réelle proposition de réforme.

En 2007, lors des débats sur la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST), les politiques avaient renoncé à s'attaquer au secteur 2, face à la colère des médecins.

L'idée avait alors émergé d'une solution médiane, le "secteur optionnel", dont la naissance est au centre des discussions actuelles entre médecins et Assurance-maladie pour la prochaine convention médicale.

Les médecins qui s'inscriraient dans ce troisième secteur, entre le secteur 1 (tarifs de la Sécu) et le secteur 2, s'engageraient à réaliser 30% de leurs actes au tarif opposable, et à facturer les 70% restants avec des compléments d'honoraires ne dépassant pas 50% de ce tarif.

Il est prévu qu'il concerne, dans un premier temps, les chirurgiens, les anesthésistes et les obstétriciens, mais l'idée et d'ensuite l'étendre.

Laetitia Clavreul

mercredi 11 mai 2011

L'AP-HP vise 100 millions d'euros de déficit en 2011

| Le Figaro | 10/05/2011 |

Ce résultat marquerait une stabilisation par rapport à 2010, malgré un «handicap de départ» de 71 millions d'euros, selon la direction de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Un millier de postes sera supprimé.

L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) affichera cette année un déficit de 100 millions d'euros. À condition que l'État débloque les crédits votés mais gelés pour le moment, pour contrebalancer un éventuel dérapage des dépenses nationales de santé - faute de quoi, ce sont environ 35 millions d'euros supplémentaires qui manqueraient à l'appel.

En 2010, le «trou» du plus gros CHU de France a été de 102 millions (115 millions en tenant compte d'éléments exceptionnels liés à un nouveau système comptable). En 2009, il atteignait 95 millions.

La stabilité, voire la dégradation envisagée pour 2011, pourraient susciter le découragement du personnel, qui a le sentiment d'être largement mis à contribution pour rééquilibrer les comptes: un millier de postes sur 92.000 sera supprimé cette année (essentiellement administratifs et logistiques, les effectifs infirmiers et médicaux restant inchangés), après 900 en 2010.

Consciente de ce risque, la direction - qui a présenté ces chiffres mardi aux médecins, avant de le faire aux autres représentants du personnel dans une dizaine de jours - s'attache à montrer que, malgré les apparences, l'AP-HP est sur la bonne voie.

D'abord en soulignant que la tendance est conforme à celle inscrite dans le plan stratégique 2010-2014, voire un peu meilleure. Ensuite en rapportant le déficit annoncé au montant total du budget 2011, qui frôle 6,5 milliards d'euros (les chiffres restent à confirmer, l'Assistance publique attendant encore des éléments de l'Agence régionale de santé pour boucler définitivement ses prévisions).

Enfin en expliquant que, si les montants versés par l'Assurance-maladie à l'AP-HP, pour chaque acte effectué, n'avaient pas été réduits depuis 2010, le déficit 2011 serait moins élevé de 71 millions d'euros.

Ce durcissement, que la direction juge «sans précédent», est en partie commun à tous les hôpitaux et en partie spécifique à Paris, qui historiquement bénéficiait d'enveloppes plus élevées que les autres établissements publics pour une prestation identique.

Cette «convergence» sera derrière l'AP-HP en 2012, ce qui devrait faciliter le retour à l'équilibre financier fin 2012, objectif auquel la direction ne renonce pas.

Plus de 500 millions d'investissements

Cela passera par des efforts supplémentaires. La nouvelle directrice générale, Mireille Faugère, a changé de méthode pour y parvenir: elle a fixé des objectifs à chacun des 12 groupes hospitaliers qui composent l'AP-HP, les laissant libres de proposer les mesures pour y parvenir, plutôt que de les imposer du siège.

Résultat pour 2011: un cocktail un tiers d'économies/deux tiers d'activité donc de recettes supplémentaires (2000 séjours chirurgicaux additionnels, 6000 séjours en médecine, 400 en obstétrique… en regagnant des «parts de marché»).

En outre, 16 projets vont être lancés pour «copier», au sein même de l'AP-HP, l'organisation des services les plus efficaces, en matière de prise de rendez-vous, de taux d'utilisation des blocs opératoires, de développement de la chirurgie ambulatoire, ou encore de conditions de travail et d'absentéisme.

Dernière caractéristique du budget 2011: des investissements en léger recul sur la maintenance et la mise aux normes (240 millions d'euros, entièrement autofinancés) mais au moins maintenus sur les «grands projets» (270 millions financés par l'emprunt).

mercredi 9 mars 2011

Le traitement du cancer coûte-t-il trop cher ?

Le Point.fr - Publié le 09/03/2011

C'est la question à laquelle tente de répondre un groupe de l'Académie de médecine. Il prône un bon emploi des nouveaux médicaments.

Les sommes dépensées pour traiter certains malades du cancer (mais c'est vrai aussi pour d'autres affections) ont de quoi faire peur.

C'est d'ailleurs avec un article paru dans le New York Times en juillet 2009 que le vice-président du Comité consultatif national d'éthique avait attiré l'attention du groupe de travail de l'Académie nationale de médecine sur le prix des médicaments.

À partir d'un exemple concret, l'auteur de cette enquête se demandait s'il était éthique de dépenser 54 000 dollars pour allonger une vie de quelques mois.

Dans notre pays, le pourcentage des dépenses consacrées aux médicaments du cancer est - encore - faible (un peu plus de 1 % des dépenses pharmaceutiques de l'Assurance maladie), mais les prix de certains nouveaux médicaments connaissent une croissance très forte, et atteignent des niveaux jusque-là méconnus.

"Un traitement est considéré comme cher lorsqu'il coûte plusieurs milliers, voire des dizaines de milliers d'euros, par malade et par an", avance le professeur Jacques Rouëssé, ancien directeur du centre anticancéreux René-Huguenin de Saint-Cloud et membre de ce groupe de travail.

Des remèdes chers pour quelques semaines de survie

Mais ce spécialiste fait la différence entre trois types de situation concernant ces molécules, pour la plupart dites "ciblées", puisqu'elles n'ont d'effet que si la tumeur a des caractéristiques bien définies.

Tout d'abord, des traitements ont profondément transformé le pronostic de certains cancers, comme les leucémies myéloïdes chroniques, et de tumeurs gastriques très rares. Ils permettent de longues rémissions, avec une bonne qualité de vie.

"D'autres entraînent des régressions seulement transitoires, mais dans des tumeurs jusqu'à présent impossibles à soigner, comme celles du rein et du foie", explique le professeur Rouëssé. "C'est donc un espoir à creuser."

Enfin, certains médicaments ne rajoutent, en moyenne, que quelques semaines de survie dans des cancers contre lesquels on dispose déjà de médicaments.

"Cela veut dire que certains malades ne vont absolument pas en bénéficier, tandis que d'autres vont avoir des survies prolongées et de qualité", précise le spécialiste. "Comme on ne peut pas le prévoir, on donne le traitement en tenant compte de divers critères, au cas par cas."

Augmentation régulière de l'espérance de vie

Globalement, l'utilisation de ces thérapeutiques spécifiques a permis d'augmenter de façon assez régulière la survie des patients atteints de nombreux cancers métastatiques.

Pour les tumeurs colorectales, la médiane de survie était de 11,3 mois dans les années quatre-vingt en utilisant des chimiothérapies standard et elle est actuellement de 25,1 mois avec les chimiothérapies nouvelles.

Pour les cancers broncho-pulmonaires, ces chiffres sont respectivement de 2,4 et 12 mois. Pour certains cancers du sein particulièrement sévères, on est passé de 10 à 31 mois.

Le but des auteurs de ce travail était de tirer la sonnette d'alarme et d'insister sur l'absolue nécessité de prescrire à bon escient les médicaments chers.

"La France est le pays qui utilise le plus d'anticancéreux", remarque le professeur Rouëssé. "Nos résultats sont bons, mais pas supérieurs aux autres. Il faut donc correctement évaluer et suivre les bénéficiaires de ces médicaments, comme on le fait lors d'un essai thérapeutique."

Enfin, les spécialistes rappellent que, selon le plan Cancer 2003-2007, les dépenses de l'Assurance maladie pour cette pathologie sont de l'ordre de 14 milliards d'euros par an, contre 17 milliards pour les maladies cardio-vasculaires.

Entre 2004 et 2007, ces dépenses ont crû de 7,2 % pour le cancer, de 8,5 % pour les maladies cardio-vasculaires, de 12,6 % pour les affections psychiatriques et de 16,1 % pour la maladie d'Alzheimer et les démences.

mardi 8 mars 2011

Hôpitaux publics : pour les médecins, la direction "décode" à plein tube !

Le Point, 8 mars 2011

Tous les établissements de santé sont financés selon leur activité. Mais le codage qui permet de la calculer est un casse-tête.

À l'hôpital, on frise l'hystérie. En particulier à l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP), premier centre hospitalo-universitaire (CHU) de France et d'Europe.

La direction du groupement hospitalo-universitaire (GHU) de Cochin-Hôtel Dieu-Broca menace à demi-mot de faire porter sur ses chefs de service la responsabilité des futures suppressions de postes en cas de codage incomplet des actes médicaux.

Dans un courriel envoyé le 19 janvier 2011 et que nous nous sommes procuré, Stéphane Pardoux, directeur adjoint de ce GHU, rappelle ainsi que "300 séjours génèrent plus d'un million de recettes, soit l'équivalent en masse salariale de 25 agents". En clair : si vous codez mal ces séjours, vous ferez perdre tant de postes...

"Jusque-là, de tels arguments pouvaient éventuellement être évoqués oralement, mais désormais la direction ne se gêne pas pour l'écrire. Elle est complètement décomplexée", s'indignent plusieurs médecins.

Un chirurgien ajoute, sous couvert d'anonymat : "Surtout qu'il s'agit d'un pur mensonge, les suppressions de postes sont au programme quelle que soit la qualité de notre codage !" En effet, 4 000 postes doivent être supprimés à l'AP-HP d'ici à 2012, année butoir pour revenir à l'équilibre, selon le ministère de la Santé.

Que représentent ces codes ? Tous les établissements de santé, publics comme privés, sont désormais financés par rapport à leur activité. En principe, plus cette dernière est grosse, plus ils gagnent. C'est ce qu'on appelle la tarification à l'activité (T2A). Une activité calculée grâce au codage : à chaque patient et à chaque étape de son séjour à l'hôpital correspond un code. Et à chaque code correspond un montant en euros.

Ce n'est pas tout : si le malade souffre de plusieurs maux, la hiérarchie des diagnostics, entre le principal et les associés, peut rapporter plus ou moins gros à l'établissement. Autant dire que le codage est devenu capital pour les gestionnaires des établissements de santé... et un vrai casse-tête pour les médecins.

Malaise

À l'AP-HP, dans certains services, les médecins rentrent eux-mêmes les codes alphanumériques correspondant à leurs actes.

Dans les CHU de province, les cliniciens sont surtout tenus de bien informer le médecin DIM - responsable de l'information médicale -, lequel se charge ensuite de transformer les données en codes.

Ce codage est mal vécu par les praticiens hospitaliers qui, même s'ils s'y sont mis, demeurent peu motivés. Ils jugent l'activité trop contraignante et n'y comprennent souvent rien : "À profil de malades constant, on peut très bien ne pas avoir les mêmes euros d'une année sur l'autre", nous explique ainsi le professeur Vergnenègre du CHU de Limoges, l'un des rares centres à finir l'année en positif.

"Car les tarifs des actes évoluent tous les ans." Enfin, les médecins ressentent bien souvent un malaise à considérer leur patient comme une recette. Certains sont même persuadés qu'"à terme, de manière certes insidieuse, le codage pourrait influencer [leur] pratique". Pas au niveau de la sélection des malades, certes, mais dans la manière de les soigner.

"Les durées de séjour optimales en termes de recettes ne sont pas forcément concordantes avec l'intérêt médical du patient", nous avoue d'ailleurs le professeur Frenkiel, responsable de l'unité d'information médicale du GHU de Cochin-Hôtel Dieu-Broca.

Retard face au privé

Reste que dans le cadre de la T2A, "optimiser" et "maximiser" le codage représente sans doute la seule solution de survie des hôpitaux publics en permettant de "générer un maximum de recettes", comme le répètent à l'envi nos interlocuteurs.

Mais face aux cliniques, ils accusent encore un sacré retard ! Alors que dans le privé, la fonction de codeur est professionnalisée depuis longtemps, elle est à ses balbutiements dans le public.

Au GHU de Cochin-Hôtel Dieu-Broca, cette professionnalisation est en cours. Elle devrait se terminer fin 2012 alors que la T2A a été introduite en 2004 et généralisée depuis 2008...

En l'état actuel des choses, "la situation est très en défaveur de l'hospitalisation publique", reconnaît le professeur Frenkiel. Et l'équité de la T2A, plébiscitée au départ car elle devait permettre de financer les établissements selon leur activité, est loin de pouvoir être atteinte.

La faute aux médecins et à leur mauvaise volonté de se mettre à coder ? Aujourd'hui, les médecins DIM reconnaissent en tout cas que l'action de codage est devenue bien trop complexe pour être faite directement, de manière complète et optimale par les cliniciens...

Alors serait-ce cette même autorité administrative qui menace aujourd'hui les médecins qui coderaient mal, la responsable de ce manque à gagner ?

Enveloppe limitée

Malgré tout, même avec lenteur, "le taux d'exhaustivité par rapport au codage souhaité ne cesse de s'améliorer" ces derniers mois, relève Olivier Guigou, cadre administratif à l'hôpital Cochin. Mais il s'agit d'une amélioration surtout quantitative.

Ainsi, en orthopédie, "on a codé plus de 6 000 consultations supplémentaires en 2009 par rapport à 2008, ce qui est colossal !" détaille Olivier Guigou.

De même, dans le service d'urologie de Cochin, des progrès considérables ont été réalisés ces dernières semaines : grâce à un meilleur codage des 19 000 consultations annuelles, "l'activité a augmenté de 6 %, correspondant à une valorisation en recettes de 38 % !"

Les urologues de Cochin reconnaissent cette embellie, mais certains n'hésitent pas à émettre des réserves : "D'une part, il s'agit d'une hausse artificielle de notre activité, puisque c'est simplement par le jeu d'un meilleur codage qu'elle progresse. D'autre part, si on est si forts que ça, on devrait être récompensés, comme on nous le promet dans le cadre de la T2A.... Alors pourquoi notre service est-il un des seuls de l'Assistance publique à disposer encore de chambres à trois lits ?"

L'enveloppe votée par le Parlement chaque année pour le financement de la santé n'est pas extensible. Alors, même si tous les établissements codaient parfaitement et affichaient une hausse de leur activité, les sommes allouées ne pourraient pas être supérieures à celles de l'année précédente.

Difficile de voir comment la T2A pourrait ainsi régler les problèmes colossaux du financement de la santé en France...