mardi 14 février 2012

jeudi 9 février 2012

Cancer: combien vaut une vie?

L'Express - 08/02/2012

En Grande-Bretagne, les traitements supérieurs à 50 000 euros par an ne sont plus pris en charge. Demain, en sera-t-il de même en France?

Combien "vaut" une année de vie? Plus précisément, combien la société est-elle prête à payer pour prolonger, ne serait-ce que de quelques mois, la vie de l'un de ses membres? Ces questions n'ont rien d'anecdotique.

En Grande-Bretagne, elles ont même conduit les autorités sanitaires à prendre récemment une décision qui peut sembler surprenante: partant de l'estimation qu'une année de vie supplémentaire "vaut" environ 50 000 euros, dorénavant, elles ne remboursent les traitements contre le cancer supérieurs à cette estimation.

Et si la qualité de vie des patients est diminuée malgré les médicaments, ce montant de 50 000 euros sera diminué d'autant...

En France aussi, le coût de prise en charge du cancer explose: pour 100 000 habitants, il atteint aujourd'hui 5 millions d'euros rien qu'en chimiothérapie, contre 2 millions au Royaume-Uni.

A tel point que les dépenses totales des anticancéreux dans l'Hexagone sont passées, entre 2004 et 2009, de 473 millions à 1 milliards d'euros!

Or, rappelait la Haute Autorité de santé dans un avis de février 2011, 18 semaines de traitements, soit deux mois et demi, avec des molécules particulières dites "ciblées" coûtent, en moyenne, 55 000 euros par an pour une amélioration de l'espérance de vie médiane de... 1,2 mois seulement.

La situation en France risque d'évoluer

Est-ce trop? Il ne faut pas négliger le fait que ces médicaments nouvelles génération, dont le nom se finit en général par "ib", présentent un intérêt particulier, car ils agissent spécifiquement contre une tumeur donnée et pour un patient donné. Les médecins ont donc l'assurance qu'ils sont efficaces.

En outre, dans certains cas ils se révèlent, par la suite, d'une utilisation plus large que prévue. Enfin, pour le malade comme pour son entourage, ces quelques semaines de vie supplémentaires n'ont pas de prix.

Certes, il n'est pas question, à ce jour, de prendre le pli de la Grande-Bretagne.

Pour autant, dans un contexte de limitation des dépenses de santé tel qu'on le constate depuis une dizaine d'années, il n'est pas sûr que les autorités sanitaires françaises continuent de rembourser "aveuglément" ces molécules.

Surtout vu "l'opacité" générale, selon les termes de la Haute Autorité de santé, qui entoure les mécanismes de fixation de prix de ces thérapeutiques innovants et qui profite, en premier lieu, aux laboratoires pharmaceutiques qui les commercialisent...

Alors, faudra-t-il, un jour, choisir entre une chimiothérapie, une intervention chirurgicale ou un médicament?