vendredi 29 janvier 2010

La Roumanie, nouvel éden des étudiants en médecine

Marion Brunet Lefigaro.fr 29/01/2010

Alors qu'en France, 85 % des étudiants échouent à la fin de la première année de médecine, l'université de Cluj, situé au cœur de la Transylvanie, les recrute sur dossier. Un système qui a poussé de nombreux Français à quitter l'hexagone.

Un plan B existe désormais pour tous les recalés du concours de médecine. A l'université de Cluj en Roumanie, des centaines d'étudiants français arrivent chaque année pour décrocher le précieux sésame qui leur ouvrira les portes de médecine, dentaire ou pharmacie.

Alors qu'ils n'étaient encore que deux ou trois il y a quelques années, ils sont aujourd'hui 262 à s'être lancés dans l'aventure. Un exode qui a commencé dans les années 2000 avec la création d'une filière en français.

«A cette époque là, plusieurs pays francophones nous avaient demandé de former leurs étudiants en français, explique au Figaro.fr le recteur de l'université, le docteur Constantin Ciuce. Former les étrangers est pour nous une tradition vieille de 35 ans. Et comme nous disposions des infrastructures nécessaires et que de nombreux professeurs parlaient cette langue, nous avons sauté le pas».

L'entrée de la Roumanie dans l'Union européenne (UE) en 2007 a ensuite permis de parachever le processus avec la reconnaissance du diplôme dans tous les pays de l'union.

Le mode de recrutement n'est sans doute pas pour rien dans le succès rencontré par l'université de Transylvanie. A Cluj, les étrangers non roumanophones ne passent pas de concours d'entrée. Le recrutement se fait sur dossier.

«Nous sélectionnons des gens très motivés qui viennent des meilleurs lycées, mais qui n'arrivent pas forcément à obtenir le concours de médecine en France», reconnaît Constantin Ciuce.

5 000 euros de frais universitaires, 70 % des cours obligatoires

«Nous sommes jugés sur nos notes au baccalauréat, précise toutefois Michel Guigon, un Niçois en deuxième année de dentaire. J'étais très bon en sciences, mais j'ai surtout mis l'accent sur mon parcours personnel. J'ai travaillé pendant six ans comme secouriste, pompier ou encore brancardier pour pouvoir payer mes études.»

Et pour cause, les étrangers doivent s'acquitter chaque année de 5 000 euros de frais universitaires.

Pour les Français admis à Cluj, les trois premières années d'études se déroulent dans leur langue maternelle. Programmes et examens sont cependant les mêmes que dans la filière roumaine. Ce n'est qu'à partir de la quatrième année que les sections sont réunies et que le roumain devient la langue maîtresse, examens mis à part.

La direction de l'université met un point d'honneur à faire respecter l'assiduité. «70 % des cours sont obligatoires. En-dessous de ce quota, nous ne pouvons pas présenter les examens de fin d'année, seulement les rattrapages», explique Michel Guigon.

Un système qui permet de faire un écrémage d'une année sur l'autre : s'ils sont actuellement 150 en première année toutes filières confondues, ils ne sont plus que 62 l'année suivante et 29 en troisième année.

Faire carrière en France

Pour ceux qui iront jusqu'au bout de leur cursus, l'objectif reste bien souvent le même : rentrer en France.

«Je compte y faire mon internat à la fin de ma sixième année, le but étant ensuite de faire ma carrière dans les hôpitaux français», confie Boutabba Abdelnacer, étudiant en cinquième année de médecine.

Certains préfèrent cependant faire un crochet par un autre pays de l'UE pour compléter leur formation, à l'instar de Régis Combé, actuellement en troisième année de Pharmacie à Cluj : «Je vais sûrement poursuivre mes études en Belgique, en industrie ou pharmacie biologique, avant de retourner exercer en France. Beaucoup d'étudiants de pharma suivent cette voie à la fin de leurs cinq années à Cluj.»

Quel accueil pour ces jeunes diplômés lors de leur retour en France ?

«La reconnaissance des cursus médicaux de l'UE n'a pas à être contestée. Nous n'avons donc pas de raison de penser que ces diplômes seraient moins biens que les nôtres, tranche Cédric Lussiez, de la Fédération hospitalière de France (FDH). On ne peut d'ailleurs pas regretter que certains de nos médecins soient formés à l'étranger, à l'heure où les inquiétudes se multiplient sur le nombre de docteurs capables de répondre aux enjeux démographiques de demain.»

La direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, rattachée au ministère de la Santé, émet toutefois une condition à la reconnaissance du diplôme : la spécialité étudiée doit exister en France.

Le recteur de l'université roumaine attend de son côté encore trois ou quatre années avant d'évaluer les résultats de ses anciens étudiants français sur le marché du travail.

Les deux premiers Français diplômés de Cluj viennent seulement de passer le concours de l'internat dans l'hexagone. Et de décrocher un poste dans des hôpitaux parisiens.

mercredi 27 janvier 2010

Cette maltraitance "ordinaire" qui règne dans les hôpitaux

Humiliation, mépris, culpabilisation, atteintes à l'intimité... Les témoignages extraits de l'étude publiée mercredi 27 janvier 2010 par la Haute Autorité de santé (HAS) font froid dans le dos.

Collectés par Claire Compagnon et Véronique Ghadi, ancienne militante associative et sociologue de la santé, ils reflètent le malaise de nombreux malades, proches ou professionnels de santé face à la maltraitance "ordinaire" qui règne dans certains hôpitaux. Des vexations plus ou moins douloureuses qui nuisent à la dignité du malade et à la réputation des établissements.

Le rapport, qui se présente comme une étude volontairement subjective, reprend une centaine de récits. Patients, famille, infirmiers... Tous racontent l'attente, l'abandon, l'absurde parfois.

"Coralie reste nue sur le brancard dans le couloir du service pendant dix minutes. Je prends une couverture dans la chambre, on me reproche d'avoir défait le lit", raconte une mère. "Il y a des moments où je restais dans le pus et dans mes excréments toute la matinée", décrit un malade.

"UNE CERTAINE BANALISATION DE LA VIOLENCE"

De quoi interpeller les pouvoirs publics. "Face à une certaine banalisation de la violence, il apparaît nécessaire de rappeler au personnel hospitalier, mais aussi aux patients, la nécessité du respect réciproque", estimait le 12 janvier 2010 le médiateur de la République Jean-Paul Delevoye.

Un "Pôle santé et sécurité des soins", chargé de traiter les réclamations liées aux droits des malades et à la sécurité des soins été a mis en place début 2009 par le médiateur de la République. En un an d'activité, il a traité près de 4 800 requêtes.

La maltraitance, reconnaît une directrice d'hôpital, "c'est comme les infections nosocomiales, ça ne devrait pas arriver". Les professionnels parlent des réductions d'effectifs ou du manque de matériel… "Il y a vingt ans, il y avait sept aides-soignantes le matin, alors que maintenant il n'y en a plus que deux ou trois pour des patients plus lourds qu'avant", explique un cadre de santé.

Pour lutter contre ces dérives, un "guide de la bientraitance en établissements de santé" devrait être publié dans l'année. Trois critères de qualité seront par ailleurs intégrés dans la nouvelle procédure de certification des hôpitaux : la gestion des plaintes et des réclamations, la mise en œuvre des soins palliatifs et des droits des patients en fin de vie, la mise en place d'une démarche de bientraitance.

samedi 23 janvier 2010

3 000 à 4 000 postes seront supprimés d'ici à 2012 dans les hôpitaux parisiens

lemonde.fr avec AFP | 23.01.10

Pour revenir à l’équilibre, l’AP-HP doit, d’ici à 2012, dégager 300 millions d’euros. 20 % pourront provenir de recettes supplémentaires, mais 80 % passeront par une baisse des dépenses, dans lesquelles les salaires représentent 70 %.

Le directeur de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) Benoît Leclercq a confirmé la suppression d'ici à 2012 de 3 000 à 4 000 emplois sur un total de 92 000 et détaillé son plan de réorganisation des hôpitaux parisiens, dans un entretien samedi au Parisien-Aujourd'hui en France.

L'AP-HP compte actuellement 37 hôpitaux et 676 services cliniques. L'AP-HP avait présenté en novembre les grandes lignes de son projet de réorganisation, prévoyant 90 à 100 millions d'euros d'économies par an via des suppressions d'emplois, pour retrouver un équilibre budgétaire en 2012. Les syndicats avaient alors affirmé que cela se traduirait par la disparition de près de 3 500 emplois.

"D'ici à 2020, nous pourrions réduire de quelques sites le nombre de nos hôpitaux", déclare Benoît Leclercq, estimant que "du fait de la vétusté de certains locaux, moderniser en regroupant revient souvent moins cher que de rénover".

Par exemple, poursuit le responsable, "la seule mise aux normes de l'Hôtel-Dieu coûterait ainsi 280 millions d'euros, alors que la création de 450 nouveaux lits à Necker ne représente que 180 millions d'euros".

L'AP compte aussi "regrouper certains services de chirurgie de Cochin et de l'Hôtel-Dieu", de même que les services ORL de Saint-Louis et Lariboisière.

"D'ici à la fin 2010, les trois services qui s'occupent des grands brûlés seront regroupés sur Saint-Louis", détaille encore le patron des hôpitaux parisiens. Il assure aussi que "en cinq ans, l'offre en périnatalité pourrait progresser de 5 à 10 % à l'AP. Soit entre 2 000 et 4 000 accouchements en plus".

mardi 19 janvier 2010

Nicolas Baverez: L'hôpital en quête d'une ordonnance

Publié le 15/01/2009 N°1896 Le Point | Par Nicolas Baverez

Les trois décès intervenus dans les hôpitaux de la région parisienne, après le sinistre sanitaire des surirradiés d'Epinal et à la veille du jugement sur l'hormone de croissance et ses 114 jeunes victimes, éclairent d'un jour cru la dégradation de la qualité des soins en France, en particulier au sein des hôpitaux publics. Le nombre des décès découlant d'erreurs médicales est évalué à 10 000 en France. Autre indicateur clé, la mortalité avant 5 ans s'élève à 0,8 ‰, contre 0,5 aux Etats-Unis et en Allemagne et 0,6 au Royaume-Uni. Sous ces données pointe la dégradation accélérée des performances du système de santé français, qui, placé en tête du classement mondial par l'OMS en 2000, figure désormais à la dixième place en Europe. L'excellence française en matière de santé relève désormais du mythe.

La chute des performances du système de santé ne doit rien au manque de moyens. La France consacre 11,5 % de son PIB à la santé, soit le troisième rang mondial après les Etats-Unis (16 % du PIB) et la Suisse (13 %). L'hôpital représente 64 % des dépenses hors médicaments, contre 53 % en Allemagne, 30 % aux Etats-Unis, 48 % pour les pays de l'OCDE, alors que les soins ambulatoires restent limités à 28 % (contre 38 % dans l'OCDE). Quant aux effectifs hospitaliers, ils sont identiques à ceux de l'Allemagne, qui compte 18 millions d'habitants supplémentaires avec une espérance de vie légèrement meilleure. Le système de santé français ne souffre donc nullement d'un poids ou d'un financement insuffisants des hôpitaux, mais de leur excès. L'absence d'organisation et de continuité des soins se traduit par un recours démesuré à l'hôpital (251 hospitalisations pour 1 000 habitants, contre 161 dans l'OCDE), qui génère des surcoûts considérables (51 milliards d'euros en 2009, auxquels s'ajoute un déficit d'au moins 1 milliard en 2009 comme en 2008), mais aussi des risques sanitaires élevés (infections nosocomiales). D'où un suréquipement hospitalier manifeste avec un établissement pour 22 000 habitants, contre un pour 44 000 en Europe, la diminution du nombre d'établissements depuis 1992 ayant été concentrée sur les cliniques (-19 %, contre-4 % pour les hôpitaux publics). D'où le retard en matière d'hôpital de jour, de structures de rééducation, de prise en charge de la dépendance, de prévention surtout (1,8 % des dépenses, contre 3,1 % dans l'OCDE).

La régression du système de santé français s'explique par quatre problèmes fondamentaux. Le premier touche à l'inégalité croissante dans l'accès et la qualité des soins, avec l'apparition de déserts sanitaires dans les zones rurales, en raison des contraintes de vie pour les professionnels de la santé, ou dans les banlieues, pour des raisons d'insécurité. Le deuxième tient à l'éclatement des filières et des structures de soins, notamment le cloisonnement entre médecine de ville et médecine hospitalière, et à la stratification anarchique des niveaux administratifs (services, pôles, hôpital, centre hospitalo-universitaire, communauté hospitalière, agence régionale hospitalière, agence régionale de soins, ministère...). Le troisième découle de la sous-productivité et de la dégradation des soins dans les hôpitaux pour de nombreuses raisons : l'éclatement des structures, étant entendu que taille insuffisante, sous-activité et dangerosité vont de pair ; la rivalité permanente entre les pouvoirs administratif, médical et infirmier ; la sous-utilisation chronique des équipements et des compétences du fait des 35 heures (les blocs opératoires les plus performants de l'Assistance publique à Paris ne fonctionnent que 7 heures 36 minutes par jour, et le plus souvent 4 jours sur 5 du fait d'une maintenance effectuée pendant la semaine, contre 18 heures 6 jours sur 7 dans les structures privées) ; l'accumulation des tâches administratives des équipes soignantes et la montée d'une culture de la procédure au détriment de la responsabilité médicale. Le quatrième travers est à chercher dans les lacunes béantes en matière de mesure de la qualité des soins, alors qu'elle constitue le corollaire obligé de la tarification en fonction des pathologies.

Nul ne peut contester la priorité qui s'attache à l'amélioration du système de santé, dont la déliquescence doit être enrayée tant pour des raisons de cohésion sociale et d'efficacité économique que de soutenabilité des comptes publics : le déficit de la Sécurité sociale devrait en effet atteindre 15 à 20 milliards d'euros en 2009, dont la moitié pour l'assurance-maladie, avec une dette sociale culminant autour de 160 milliards d'euros, contre 41 milliards en 1996. Le pivot en est l'hôpital, que les projets de réforme entendent réorganiser autour de trois axes : la transformation des directeurs d'hôpital en patrons à part entière dotés de pouvoirs élargis en matière de recrutement et de rémunération des personnels ; le regroupement des établissements en communautés hospitalières ; la création d'agences régionales chargées de coordonner l'offre de soins. Le pari paraît très aléatoire, qui consiste pour l'Etat à planifier et à rationaliser l'offre de soins sur une base régionale. Le dirigisme sanitaire semble en effet une réponse paradoxale aux défis que doit relever le système de santé français. En matière de santé, l'Etat continue à s'occuper de tout et de tous, sauf des soins et des malades

mercredi 13 janvier 2010

Nicolas Sarkozy veut refonder la médecine libérale

Le Figaro 12/01/2010

Le président de l'Ordre, Michel Legmann, devra formuler des propositions fin mars 2010.

Opération réconciliation. Alors que le gouvernement est en froid avec les médecins libéraux sur de nombreux sujets (vaccination contre la grippe A, gel des tarifs, menaces diffuses sur la liberté d'installation…), Nicolas Sarkozy a annoncé mardi le lancement d'une mission pour «refonder» la médecine libérale. Le chef de l'État, qui s'exprimait lors de ses vœux au monde de la santé à Perpignan, ambitionne d'«inventer un nouveau modèle» qui soit «attractif».

C'est le président du Conseil national de l'ordre, qui sera chargé de formuler des propositions d'ici à fin mars. Le Dr Michel Legmann a plusieurs fois exprimé - notamment lors de la publication de l'atlas annuel de son instance sur la démographie médicale - ses inquiétudes de voir si peu de jeunes médecins s'installer en libéral.

Le président de la République lui a fixé cinq grandes orientations : alléger les charges administratives, assurer la qualité et l'évaluation des soins, donner aux médecins de ville les moyens de mieux accueillir les patients notamment pour les urgences sans gravité, permettre l'exercice sur plusieurs lieux et encourager la coopération avec les pharmaciens ou les infirmières libérales.

1 800 postes en moins à l'hôpital

Cette annonce est intervenue au lendemain de l'expiration du délai dont les syndicats médicaux et l'Assurance-maladie disposaient pour bâtir une nouvelle convention et définir ainsi leurs rapports pour les cinq années qui viennent. Cet échec - très prévisible - ouvre la voie à un «règlement arbitral», que l'ancien président du Haut Conseil pour l'avenir de l'Assurance-maladie, Bertrand Fragonard, devra rédiger d'ici au 10 mai. La ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, l'a déjà «cadré» : la préparation de ce texte ne sera «ni le lieu ni le moment de discussions tarifaires approfondies», a-t-elle déclaré au Quotidien du médecin. Autrement dit, pas question de relever le prix des consultations ou des actes médicaux.

Le président de la République a aussi répété mardi sa volonté de voir les hôpitaux réduire à zéro leurs déficits d'ici à 2012. Cela passera largement par des baisses d'effectifs, par le non-remplacement de certains départs ou l'externalisation de certains services. Selon la Fédération hospitalière de France, citée mardi par Les Échos , les effectifs des hôpitaux publics ont reculé l'an dernier (-1 800 postes, soit 0,2 % du personnel). Une première.

mardi 12 janvier 2010

L'hôpital public supprime des emplois... depuis 2008

lemonde.fr | 12.01.10

Les hôpitaux publics connaissent une baisse historique de leurs effectifs. Les Echos du mardi 12 janvier 2010 annoncent que 1 800 postes ont été supprimés, après 100 000 créations ces dix dernières années.

Pour Cédric Lussiez, directeur de la communication de la Fédération hospitalière de France, ces suppressions de postes ont même eu lieu dès 2008, et non en 2009.

Il se réfère à la statistique annuelle des établissements du ministère de la santé.

"Le chiffre agrégé sur lequel le gouvernement communique montre toujours une hausse parce qu'il prend en compte les salariés des maisons de retraites publiques, mais il y a bel et bien eu un retournement de tendance du côté des hôpitaux", souligne-t-il.

Et ce, après une décennie marquée par de nombreuses créations de postes, principalement sous l'effet des 35 heures.

Ce n'est que le début des baisses d'effectifs, s'inquiètent directeurs d'hôpitaux et médecins, qui ont déjà dû réduire leur recours aux CDD et à l'intérim ces dernières années.

Les établissements hospitaliers ont commencé à mettre en œuvre les suppressions d'emplois prévues d'ici à 2012, dans le cadre des plans de retour à l'équilibre des comptes. Plus de 10 000 suppressions de postes ont d'ores et déjà été annoncées, mais 15 000 pourraient s'avérer nécessaires.

"ON NOUS DEMANDE DE SOIGNER PLUS AVEC MOINS DE PERSONNELS"

Ces mesures d'économie ont été demandées par le gouvernement après un creusement des déficits des hôpitaux entre 2006 et 2008, pour atteindre 700 millions d'euros (sur un budget total de l'ordre de 55 milliards).

Des déficits qui résultent du "sous-financement" accordé par l'Etat, dénonce Bruno Devergie, vice-président de la Confédération des praticiens des hôpitaux.

"Le passage à la tarification à l'activité en 2005 était censé apporter des moyens supplémentaires. Mais il n'a pas permis de financer la croissance des besoins des établissements, notamment liées au vieillissement de la population", estime-t-il. "Le budget global accordé ne progresse plus que de 3 % par an, contre 4 % auparavant", explique de son côté Cédric Lussiez.

Nicolas Sarkozy n'a pas étendu aux hôpitaux la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, mais les personnels se considèrent comme les principales futures victimes de la rigueur demandée, dans la mesure où les salaires pèsent pour 70 % dans les budgets des hôpitaux.

"On nous demande de soigner plus et mieux avec moins de personnels. Mais à force de supprimer, on ne pourra pas maintenir la qualité des soins", prévient Bruno Devergie.

Claire Ané

Didier Tabuteau: "La protection est d'autant moins coûteuse qu'elle est universelle"

LEMONDE.FR | 11.01.10 | 17h23

Lulu: Le système de santé français est-il en train d'être privatisé à l'américaine ?

Didier Tabuteau : A l'américaine, non, car la couverture de base reste la même pour tous. Mais il y a une privatisation progressive des dépenses de soins courant, c'est-à-dire en dehors des affections graves, les affections de longue durée ( ALD), et des hospitalisations.

Pour ces soins courants, le taux de remboursement paraît s'établir à 55 %, selon nos estimations. Il paraît essentiel que ce taux soit publié officiellement et suivi, car c'est un indicateur majeur pour apprécier la couverture maladie réelle des personnes qui, fort heureusement, n'ont pas de maladie grave, c'est-à-dire de l'immense majorité de la population.

Guest : La sécurité sociale n'a pas un but lucratif, elle est donc forcément déficitaire. Pourquoi est-ce aussi problématique qu'elle soit... défificitaire ?

Didier Tabuteau : D'abord, je ne crois pas que parce qu'elle est à but non lucratif elle soit nécessairement déficitaire. Elle a même été excendaire certaines années. Le fait que les dépenses ne soient pas égales aux recettes est assez inévitable, puisque les recettes évoluent comme les revenus et les dépenses en fonction des évolutions épidémiologiques et du progrès médical. En revanche, ce qui n'est pas normal, c'est que ce décalage, qui est souvent un déficit, ne soit pas équilibré immédiatement par le prélèvement nécessaire.

jlc : Pourquoi ne pas considérer que l'augmentation des dépenses de santé est une bonne nouvelle (au même titre que la consommation alimentaire ou l'automobile), signe de santé économique du pays ? Et qu'il faut donc l'encourager et non parler de maîtrise des dépenses ce qui ne veut pas dire grand chose...

Didier Tabuteau :L'augmentation des dépenses de santé est effectivement une bonne nouvelle quand on peut être sûr que ces dépenses sont utilisées du mieux possible. Je suis convaincu que les dépenses de santé continueront à augmenter et qu'elles sont un formidable investissement pour le pays.

Et pourtant, il faut, dans le même temps, s'assurer, par une maîtrise drastique des dépenses, que tout est utilisé avec la meilleure efficacité. Le mot d'ordre devrait être de maîtriser les dépenses de santé pour dépenser plus.

Cyril : Pourquoi les dépassements d'honoraires se généralisent de plus en plus ? Ne risque-t-on pas d'arriver à une situation, pour les grandes villes, où le patient devra payer plus cher ou avoir une très longue attente pour obtenir un rendez-vous sans dépassement ?

Didier Tabuteau : C'est aujourd'hui un risque réel. Les dépassements ont été introduits dans les conventions médicales depuis 1980. Les médecins n'y étaient d'ailleurs pas favorables à l'origine. Mais progressivement, de plus en plus de médecins ont choisi d'exercer dans le secteur à honoraires libres avant qu'il ne soit fermé en 1990. Pourtant, depuis, à plusieurs reprises, de nouveaux espaces de liberté tarifaire ont été ouverts.

C'est un choix dangereux, car il paraît alléger le coût pour la Sécurité sociale, mais dans le même temps, il détruit ce qui est sa pierre angulaire, les tarifs opposables. La poursuite des pressions économiques sur l'assurance maladie explique sans doute ces tendances. Mais c'est également un choix politique, comme le développement des forfaits ou des franchises.

padupe : Comment expliquez-vous que la réforme de la santé rend le système plus opaque ?

Didier Tabuteau : Je crois qu'il y a de bonnes et de mauvaises raisons à cela. D'une part, on a voulu adapter les tarifications aux situations particulières, par exemple pour prendre en compte l'âge des enfants dans le tarif des consultations, ou les diverses majorations pour les dimanches ou jours fériés, ou la nuit. Tout cela peut être compréhensible, mais produit un maquis tarifaire qui détruit la lisibilité de l'assurance-maladie et peut menacer à terme le consensus social qui l'entoure.

Cela peut aussi répondre à la volonté de remettre plus fondamentalement en cause l'opposabilité des tarifs et de progressivement favoriser le développement des assurances complémentaires sur ce secteur.

jlc : Selon vous, le problème n'est donc pas le déficit mais surtout la régulation de l'offre de soins ? A ce titre la juxtaposition d'une offre de soin public, privé à but lucratif ou non, est-ce une bonne chose ou cela complique la régulation?

Didier Tabuteau : Je crois en effet que la régulation de l'offre de soins est le levier majeur pour permettre d'équilibrer le système. Ce n'est sans doute pas le seul. Cette juxtaposition de différents types d'offres de soins est, je crois, une bonne chose parce qu'elle diversifie le système, lui donne sans doute plus de souplesse et de réactivité. Mais il est vrai qu'elle complique la régulation. Je crois pourtant qu'il vaut mieux accepter une régulation plus compliquée à faire que de perdre les atouts qui ont pendant longtemps fait la force du système de santé en France.

jlc : Pensez-vous que la sécu doit se concentrer uniquement sur les risques lourds, le reste étant pris en charge par des assurance privés ou pensez-vous que la logique de complémentaire actuelle est efficace ?

Didier Tabuteau : Je crois qu'il faut à tout prix éviter que la Sécurité Sociale se concentre sur les seuls risques lourds. Bien sûr, ces risques majeurs doivent être parfaitement pris en charge, mais le remboursement des soins courants est le ciment du consensus sur l'assurance-maladie. Or cette assurance-maladie fondée sur la solidarité entre les bien portants et les malades est la meilleure façon d'offrir une prise en charge la plus égalitaire possible aux personnes touchées par la maladie.

Si la Sécurité sociale ne couvrait plus que le "gros risque", je suis convaincu que ce pilier du pacte social serait directement menacé. Les personnes les plus jeunes ou en meilleure santé pourraient être tentées de ne plus être couvertes dans ce système. Et de préférer des assurances privées avec des cotisations plus faibles. Or la tarification en fonction des risques est exactement le contraire de la solidarité sur laquelle repose l'assurance-maladie.

Eric : Pourquoi le corps médical (médecins, pharmaciens) semble préservé des efforts qu'on demande aux soignés ?

Didier Tabuteau : Cela dépend des périodes. Il y a eu des moments dans l'histoire de l'assurance-maladie où les professions de santé ont été fortement sollicitées pour contribuer à la régulation. C'est moins le cas depuis 2004, où la "responsabilisation" du patient a été mise en avant. Je crois que la régulation du système devrait reposer sur une cogestion de l'assurance-maladie par les pouvoirs publics, les caisses d'assurance-maladie, les professions de santé et les associations de patients. On est loin de cette situation.

Jeremie : Fondamentalement, le problème de la Sécu ne vient-il pas qu'il mélange des acteurs privés/publics et associatifs, au lieu d'etre à 100 % public ou privé comme dans d'autres pays (par exemple en Italie) ?

Didier Tabuteau : Je crois que la question se poserait si l'on devait construire ex nihilo un système. Mais notre assurance-maladie est bâtie depuis 1928, et surtout depuis 1945, sur une organisation mixte pour les professionels de santé et institutions hospitalières, ainsi que sur deux niveaux de financement. Je crois que même si cette organisation est complexe, elle a pendant longtemps permis de développer un système de santé accessible, ouvert sur le progrès médical, et relativement égalitaire. Le détruire pour le remplacer par un système complètement différent risquerait d'ouvrir la voie à une privatisation, même involontaire, du dispositif. Je crois que sur ses fondements actuels, il peut être non seulement consolidé, mais préparé à relever les défis des vingt prochaines années en matière de santé.

Verley : La richesse des laboratoires et la santé des français progressent-elles de concert ?

Didier Tabuteau : La richesse des laboratoires ne dépend pas que de la santé des Français et de la consommation de médicaments en France... Je crois plus sérieusement que la régulation des dépenses de médicaments doit être aussi rigoureuse que pour les autres postes des dépenses de santé. Il reste incontestablement beaucoup de travail à faire.

Anissa: Finalement, le système de sécurité sociale n'est-il pas désuet aujourd'hui ?

Didier Tabuteau : Je crois, au contraire, qu'il est un fondement de plus en plus précieux pour préparer l'avenir. Etre certain que l'assurance-
maladie prendra en charge les risques pour notre santé est une des conditions essentielles non seulement de la confiance dans l'avenir pour chacun d'entre nous, mais également du développement de notre activité économique.

La Sécurité sociale a d'ailleurs été inventée, dans ses origines bismarckinennes, pour renforcer la santé d'un pays, et pas seulement celle de ses habitants. Et je crois que cette solidarité doit être universelle, c'est-à-dire de tous les bien portants à l'égard de tous ceux qui sont confrontés à la maladie, pour des raisons d'abord d'égalité de tous devant la santé, mais également pour des raisons d'efficience du système, car cette protection est d'autant moins coûteuse qu'elle est universelle. La concurrence entre les financeurs de la santé n'a jamais fait baisser les coûts.

Bénédicte :Les Français ne sont-ils pas les plus gros consommateurs de soins remboursés d'Europe?

Didier Tabuteau : Nous avons une dépense de santé dans la richesse nationale qui est effectivement la plus élevée en Europe, avec 11 %
du PIB. En revanche, quand on regarde la dépense par habitant, nous sommes dans une bonne moyenne. Donc notre réputation de forte consommation de soins est collective plus qu'individuelle.

Cela dit, il ne faut pas oublier non plus que notre pays a de bons indicateurs de santé, notamment pour l'espérance de vie à la naissance ou à 60 ans. Et les évaluations internationales montrent que la qualité des soins dans les pathologies pour lesquelles des comparaisons ont été faites est également très satisfaisante. Notre faiblesse tient beaucoup plus à la mortalité prématurée, liée notamment aux morts accidentelles en particulier sur la route, au tabagisme ou à l'alcoolisme. Ainsi qu'aux inégalités de santé entre les différentes catégories sociales. Je pense donc que l'effort est plus à faire dans nos politiques de santé publique que dans le niveau de consommation de soins.

satazur : Comment se fait il que les medecins comme autres dentistes refusent les CMU ? est-ce car ils ne gagnent pas assez d'argent avec ?

Didier Tabuteau : Les enquêtes dont on dispose sur ce sujet montrent tout d'abord qu'il n'y a quasiment pas de refus de soins chez les
médecins généralistes. En revanche, le phénomène est marqué et inacceptable dans certaines spécialités, essentiellement pour les praticiens en secteur 2 à honoraires libres. Les raisons invoquées sont multiples, mais il paraît évident que le facteur économique est très important, puisque les médecins à honoraires libres doivent pratiquer les tarifs opposables pour les patients bénéficiaires de la CMU.

marie : y -a t'il un pays modèle en matière de protection sociale ?


Didier Tabuteau : Il y a des grands pays références, comme la Suède, qui ont réussi à concilier une relative égalité d'accès aux soins et une
maîtrise des dépenses de santé. Il faut pourtant se garder de toute tentation de transposer un système dans un autre pays, car en matière de santé, l'approche est profondément ancrée dans nos habitudes, nos comportements, nos particularités socioculturelles, et l'expérience montre que l'importation de mécanismes d'un pays à l'autre est très difficile. Je crois que le système français conserve encore aujourd'hui les ressources nécessaires pour rester à l'avenir un système de référence, pour autant que la volonté politique soit de le préserver.

Laure Belot et Cécile Prieur

Mission sur la médecine libérale

AFP 12/01/2010

Nicolas Sarkozy a annoncé ce midi avoir demandé au président du Conseil national de l'ordre des médecins un "état des lieux" de la médecine libérale et de lui faire des propositions fin mars pour la "refonder", lors de ses voeux au monde de la santé à Perpignan.

"La médecine libérale doit être refondée à l'heure même où les demandes qui lui sont adressées n'ont jamais été aussi nombreuses", a déclaré M. Sarkozy, "c'est un enjeu immense".

"Je souhaite confier une mission d'état des lieux et de propositions à une personnalité reconnue, le docteur Michel Legman, président du conseil national de l'ordre des médecins. Il faut inventer un nouveau modèle de soins de premier recours qui fasse toute sa place à la médecine libérale, un modèle attractif", a jugé le chef de l'Etat.

Parmi les "orientations" suggérées au Dr Legman, qui devra rendre ses propositions "fin mars", Nicolas Sarkozy a notamment estimé qu'il fallait "simplifier la vie du praticien", "favoriser l'effort de formation des médecins", autoriser "la possibilité d'exercer dans des maisons de santé, des centres de soins ambulatoires" et "faciliter la mobilité des médecins".

Il a aussi insisté sur "la coopération avec les autres professionnels de santé".

"Les pharmaciens d'officine, les infirmières libérales sont une composante de l'offre de soins de premier recours. Les médecins généralistes ont intérêt à partager le premier recours avec ces autres professions", a estimé M. Sarkozy.

Les Français face à un système de soins devenu illisible

LE MONDE | 12.01.10

Combien rembourse l'assurance-maladie pour tel acte médical ou tel type de consultation ? A quoi correspond ce forfait de 1 euro qui apparaît sur les relevés de remboursements ? Quels frais sont pris en charge par les mutuelles ?...

Confrontés à un système de soins devenu quasi incompréhensible au fil des années, les particuliers se disent souvent désarmés, notamment quand il s'agit de savoir à quoi correspondent les tarifs de santé.

Avec la création, au 1er janvier 2010, d'une nouvelle vignette de remboursement de médicaments, qui sera orange cette fois, et la hausse annoncée des cotisations des mutuelles de 5 %, la tâche ne devrait pas leur être simplifiée en 2010.

Comprendre les tarifs de santé est désormais aussi complexe que comprendre sa facture de téléphone", observe Christian Saout, le président du Collectif interassociatif sur la santé (CISS), qui représente les patients.

M. Saout regrette que, contrairement aux télécommunications, il n'existe pas dans le secteur de la santé d'agence de régulation. Pourtant, le système a évolué au point de paraître illisible, notamment en ce qui concerne les tarifs de la médecine de ville (hors hôpital et affections longue durée).

La diversification des tarifs remonte aux années 1980. Est alors créé, en sus du secteur 1 (médecins conventionnés par la Sécurité sociale, dont la consultation est au tarif de base), le secteur 2, qui a permis à certains médecins de pratiquer les honoraires libres. Une décision qui a débouché, vingt ans plus tard, sur la généralisation des dépassements d'honoraires, désormais considérés comme l'un des points noirs du système.

Mais c'est surtout dans les années 2000 que le système de soins s'est singulièrement complexifié.

Prises dans l'optique de responsabiliser des Français gros consommateurs de soins et de réduire le "trou" de la Sécurité sociale, les mesures créées par les pouvoirs publics ont été nombreuses, et souvent compliquées.

Comme la franchise médicale de 0,50 euro par boîte de médicaments, entrée en vigueur en 2008 et plafonnée à 50 euros par an, ou, sur le même principe, le forfait de 1 euro par consultation adopté en 2005, qui ne concerne cependant pas les dentistes ou les kinésithérapeutes.

Moins connu, un système complexe de majoration des consultations médicales en fonction des situations (urgence, week-end, consultation d'enfant) a été instauré afin de mieux adapter les revenus des médecins à leur pratique.

Ainsi, un supplément de 5 euros pour les moins de 2 ans, ou de 3 euros pour les 2 à 6 ans a été instauré chez les généralistes.

Plus marquante a été la création du parcours de soins, en 2004 qui aboutit, en cas de non-respect par le patient du passage devant le médecin traitant, à un remboursement moindre de 40 % des tarifs de consultation contre 70 % habituellement.

Autant de modifications qui se concrétisent par des lignes et des sigles supplémentaires sur les relevés de remboursement de l'assurance-maladie.

Ainsi la franchise sur les médicaments est déduite d'autres remboursements, notamment les consultations, puisque les boîtes sont souvent délivrées sans que l'assuré ait à verser quelque chose en pharmacie.

Pour rajouter à la complexité, les complémentaires de santé ne prennent pas forcément tous les déremboursements à leur charge. Ce sera ainsi le cas pour les médicaments qui vont entrer, au printemps, dans la nouvelle catégorie des remboursements "à 15 %".

Leur vignette orange s'ajoutera aux bleues et blanches des boîtes déjà remboursées à 35 %, 65 % et 100 %. Devraient y être inscrits des produits bénéficiant jusque-là du taux de 35 %, dont le service médical rendu a été jugé faible ou insuffisant. Une mesure prévue dans le budget 2010 de la Sécurité sociale.

La Mutualité française a déjà estimé que s'ils étaient jugés inefficaces, il ne fallait pas les rembourser. Ce qui ne veut pas dire que toutes les mutuelles qu'elle fédère suivront cette recommandation...

Cet exemple est la preuve que les offres des complémentaires de santé sont aussi devenues un casse-tête pour les particuliers. En témoignent les nombreux sites de comparaison apparus sur Internet.

"Les mutuelles apportent le complément des remboursements de l'assurance-maladie. Dans un système qui s'est complexifié au point de devenir d'une opacité totale, leur intervention ne peut être d'une lisibilité parfaite", justifie Jean-Pierre Davant, le président de la Mutualité française.

Alors que ce dernier a annoncé que les cotisations devraient augmenter en moyenne de 5 % en 2010 du fait de la hausse des dépenses de santé, les Français pourraient être nombreux à être tentés de changer de complémentaire. "Le turnover est important pour les assurés en contrats individuels, et les augmentations de prix sont de plus en plus un vecteur de changement", explique Mathias Matallah, président de Jalma, un cabinet de conseil spécialisé dans la santé.

Selon lui, à bien y regarder, même si les expressions utilisées diffèrent, les offres des complémentaires ne sont pas si éloignées. Les vraies différences se limitent à trois postes : les soins dentaires et l'optique, dont l'assurance-maladie s'est largement désengagée, ainsi que les dépassements d'honoraires des médecins.

Mais encore faut-il comprendre dépliants et devis... Pour permettre aux usagers de choisir en connaissance de cause, le CISS réclame la mise en place d'un contrat de base, à 40 euros pour tous les opérateurs, qui permettrait de comparer ce que les uns et les autres proposent pour ce prix.

Aujourd'hui, tous les observateurs du système de santé s'accordent à dire que sa complexité accrue pose problème. Les complémentaires de santé, poussées par les pouvoirs publics, viennent d'engager une réflexion, dont pourrait émerger, d'ici la fin 2010, un glossaire commun ou des montants de remboursements libellés en euros, et non en pourcentage des tarifs de la Sécu que nul ne connaît.

L'assurance-maladie aussi réfléchit à comment améliorer la lisibilité.

Déjà, sur son site www.ameli.fr, il est possible de se renseigner, entre autres, sur les tarifs de chaque médecin.

Depuis 2009, en outre, les professionnels doivent fournir un devis pour tout acte, avec dépassement d'honoraires, supérieur à 70 euros. Mais tous ne s'exécutent pas encore.

Laetitia Clavreul

500 plaintes pour maltraitance ordinaire à l'hôpital en 2009

L'Express | 12 janvier 2010

Le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, s'inquiète du nombre de réclamations révélant la banalisation de la violence en milieu hospitalier, près de 500 en 2009.

Un an après l'ouverture d'une ligne téléphonique dédiée aux questions de santé, le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye constate que les Français sont nombreux à dénoncer des situations de maltraitance ordinaire dans les établissements de santé. L'instance jouant les intermédiaires entre les citoyens et les services publics comptabilise, dans son bilan 2009, près de 500 requêtes portent spécifiquement sur la violence à l'hôpital. Et ce grief est aussi présent, de façon secondaire, dans près de 2000 autres doléances.

Le numéro du pôle santé et sécurité des soins du médiateur: 0810 455 455. Les situations varient du reproche adressé à la mère d'un jeune homme handicapé – "votre fils coûte déjà bien assez cher à la Sécurité sociale, et ceci depuis sa naissance" - aux brimades infligées à un adolescent atteint de violentes diarrhées – "nous ne sommes pas là pour ramasser ta m... ". Le médiateur recense à la fois des attentes interminables pour les familles demandant à accéder à leurs proches, des douleurs non soulagées, des toilettes imposées, des gifles, du matériel inadapté, l'absence de consentement du patient.

Une violence insidieuse et difficile à dénoncer

Cette violence banale, quotidienne, est beaucoup moins visible que des actes délictuels passibles du tribunal. Du coup, elle se montre insidieuse et souvent difficile à dénoncer. Pourtant, ses ressorts sont bien identifiés. Le personnel invoque souvent la fatigue, la multiplication des contraintes, l'organisation trop rigide. Mais il y a plus grave. "La violence naît d'un manque de respect réciproque entre patients et soignants, estime Jean-Paul Delevoye. Un climat de soupçon s'est installé dans la société en général et à l'hôpital en particulier.

Cette méfiance constitue une source de conflit, qui induit des comportements agressifs des usagers et des comportements défensifs chez les professionnels." Parmi les réclamations reçues par le médiateur, d'ailleurs, près de 60 émanent d'infirmières ou d'autres membres du personnel menacés ou insultés, notamment dans les services d'urgences.

Le concept de "bientraitance", pourtant, commence à s'imposer dans les hôpitaux. La Fédération hospitalière de France, fer de lance du secteur public, a édité en 2007 un guide opérationnel sur ce thème, destiné à ses adhérents. La Haute autorité de santé (HAS) propose, dans son manuel 2010 de certification des établissements de soins, "une mobilisation de l'encadrement [...] autour de la notion de bientraitance." S'agissant de personnes aussi vulnérables que des patients, la vigilance s'impose.

Cancer : Sarkozy dévoile son plan

Martine Perez | Le Figaro | 02/11/2009

Lundi, à Marseille, le président devrait annoncer des mesures pour améliorer la prise en charge des malades, le dépistage, la prévention et la recherche.

Chaque année, dans notre pays, près de 350 000 personnes découvrent qu'elles sont atteintes d'un cancer. Un diagnostic traumatisant, même si d'énormes progrès ont été faits au cours des dernières décennies, transformant cette maladie au pronostic autrefois souvent fatal, en une affection que l'on peut guérir ou contrôler désormais dans plus de la moitié des cas. Jacques Chirac avait compris l'importance de mettre en place un plan de bataille structuré contre ce mal, en lançant un plan cancer 2003-2007 (plan cancer 1) qui comprenait soixante-dix mesures. Elles ont permis des avancées notables, même si le rapport de la Cour des comptes de juin 2008 pointait plusieurs insuffisances, notamment en matière d'évaluation.




Nicolas Sarkozy, comme son prédécesseur, a mesuré l'étendue de la problématique et décidé de lancer à son tour un nouveau plan cancer pour la période 2009-2013, dont les détails seront annoncés aujourd'hui. Celui-ci s'appuie notamment sur le rapport réalisé par le Pr Jean-Pierre Grünfeld intitulé «Recommandations pour le plan cancer 2009-2013. Pour un nouvel élan», qui lui a été remis en février 2009.

Ce rapport fait le tour du problème, en tenant compte de tout ce qui a été réalisé entre 2003 et 2007. Il appréhende tous les aspects de la maladie : recherche, dépistage, traitement, prévention, social… Il fait de très nombreuses propositions, dont un certain nombre vont être reprises par le président.

Un aspect sera sans doute retenu par le président de la République parce qu'il se pose quotidiennement aux malades qui ont été guéris : comment vivre après le cancer. Car, paradoxalement, la fin des traitements, qui est une bonne nouvelle pour les malades, débouche sur une étape souvent très difficile à surmonter : la reprise de la vie quotidienne. Alors que le plan cancer 1 a permis la mise en place d'une consultation d'annonce du diagnostic mais aussi du traitement, le rapport du plan cancer 2 propose de créer un dispositif de sortie afin d'assurer une coordination entre la ville et l'hôpital, entre le champ sanitaire et médico-social et le champ professionnel. Il s'agit également d'établir une feuille de route personnalisée de la vie après le cancer, d'éditer dans chaque département un guide contenant les adresses des professionnels que les malades peuvent avoir à solliciter après la sortie, de reconnaître que le médecin traitant est le maître d'œuvre de l'accompagnement médical après le cancer.


Médecin traitant au cœur du dispositif




Le rapport du Pr Grünfeld fait également une série de propositions pour améliorer et recadrer la recherche. Le plan cancer 1 avait été l'occasion de fédérer les énergies qui jusqu'alors s'épuisaient chacune dans son coin, avec notamment la création des cancéropôles. Le rapport propose de développer la recherche de manière transversale et pluridisciplinaire, dans des domaines aussi variés que l'identification des facteurs génétiques prédisposant à certains cancers spécifiques, des nouveaux risques, notamment environnementaux… Il recommande de développer des recherches thérapeutiques en rapprochant les acteurs industriels et académiques, en travaillant sur le transfert des travaux de recherche vers les malades, en développant des réseaux dédiés aux essais cliniques, en coordonnant la recherche au niveau européen…

En termes d'organisation, il propose d'articuler sur le plan juridique l'Institut thématique cancer de l'Inserm et l'Institut national du cancer (Inca), de faciliter la vie des chercheurs en développant un guichet unique de programmation pour les appels à projet.

Bien sûr, le rapport revoit aussi certaines propositions du plan cancer précédent à la lumière de l'évolution des connaissances et des pratiques. Ainsi, il propose de remettre le médecin traitant au cœur du dispositif du dépistage qui était organisé jusqu'à présent par différents acteurs au niveau des régions, mais en excluant souvent le généraliste, notamment pour le cancer du sein. Le rapport insiste beaucoup aussi sur la lutte contre les inégalités de dépistage et les disparités d'un département à l'autre. Le rapport recommande entre autres et enfin, dans les domaines de la prévention et du dépistage, de privilégier les actions de proximité et d'éducation pour la santé et de les cibler vers les populations les plus vulnérables.

Un climat de plus en plus dégradé dans les hôpitaux

Le Figaro | 12 janvier 2010 | Delphine Chayet

Manque de tact des soignants ou agressivité des malades : le médiateur est saisi de nombreuses plaintes.

La «violence ordinaire» monte en puissance dans les hôpitaux français, selon le médiateur de la République. Ce «climat de méfiance et d'agressivité» est mis en lumière par le premier bilan du pôle santé, dont Le Figaro a pris connaissance.

Quelque 4 800 requêtes liées aux droits des malades et à la sécurité des soins ont été reçues depuis le 1er février 2009. «Dans une plainte sur deux, on rencontre des situations de maltraitance au sens large du terme , observe Loïc Ricour, responsable du pôle santé. Nous avons été très surpris par l'ampleur du phénomène, qui concerne aussi les centres de rééducation.»

Les témoignages relatent une violence insidieuse, apparemment anodine et qui ne donne pas lieu à des procédures judiciaires. C'est une vieille dame oubliée pendant des heures, sans couverture, sur un brancard des urgences. Un patient dont la douleur a été minimisée, voire moquée. Ce sont des propos infantilisants, un bruit constant, y compris la nuit, un soin intime réalisé porte ouverte… «On retrouve aussi très souvent le sentiment de ne pas avoir été informé sur sa maladie, de ne pas avoir été écouté, ni compris», indique Loïc Ricour.

Le bilan cite ainsi le cas d'une mère qui, bouleversée par les douleurs de son fils, n'aura de cesse d'alerter l'équipe médicale, sans jamais être prise en compte.

La «maltraitance ordinaire» est particulièrement ressentie dans les services d'urgences, où «l'attente et le manque d'information décuplent l'angoisse», selon Nicolas Brun, chargé de mission à l'Union nationale des associations familiales. On la retrouve aussi en réanimation, des unités très techniques, qui appliquent des procédures rigoureuses. «Les familles ont souvent l'impression d'être tenues à l'écart, alors que leur proche vit des situations de douleur et d'angoisse extrêmes», remarque Marie-Christine Pouchelle, directrice de recherche au CNRS.

Pour Jean-Paul Delevoye, le médiateur, «ce sentiment d'incompréhension génère des tensions, qui s'expriment de plus en plus par des violences à l'encontre des professionnels de santé». Le pôle a ainsi reçu 60 témoignages de médecins ou d'infirmiers victimes de violences. Les injures, insultes, crachats ou coups à l'encontre des personnels médicaux sont en augmentation régulière depuis quatre ans, selon l'Observatoire national des violences en milieu hospitalier. Le commissaire divisionnaire Fabienne Guerrieri constate que «l'hôpital n'est plus un lieu de respect : on s'y comporte comme dans la vie, en laissant éclater sa colère à la moindre frustration».


«Apprendre à devenir empathique»

La Haute Autorité de santé (HAS), qui s'apprête à rendre un rapport sur le sujet, vient d'introduire la «bientraitance» comme critère de certification des hôpitaux et cliniques. «Des progrès ont été réalisés ces dernières années dans la prise en compte des droits des patients, mais il reste une nouvelle étape à franchir», concède Raymond Le Moign, directeur à la HAS, pour qui l'accent doit être mis sur la sensibilisation et la formation. «Ce n'est pas parce que vous êtes médecin que vous êtes naturellement sensible et empathique, mais on peut apprendre à le devenir», constate Nicolas Brun. Le manque de moyens humains et les conflits de pouvoirs au sein des services sont aussi évoqués pour expliquer ce phénomène longtemps ignoré. Les spécialistes pointent le rôle du chef de service dans l'impulsion d'une dynamique positive : «S'il est attentif au respect de la dignité et de l'intimité, en général son équipe le sera aussi.»

Selon le médiateur, un dialogue rompu peut avoir des conséquences graves. Le traumatisme se révèle parfois difficilement surmontable et le doute peut alors s'insinuer sur la qualité de la prise en charge médicale.

vendredi 8 janvier 2010

Pathographie

Pathographie: Un site web sur les Actualités et avancées scientifiques en paléopathologie.

http://pathographie.blogspot.com/

Ce site Web est animé par Philippe Charlier, pathologiste et médecin légiste au CHU Raymond Poincaré de Garches.

mercredi 6 janvier 2010

Hôpital : les petits services sont plus risqués

Le Figaro - 05/01/2010 - Par Olivier Auguste

Une étude prouve le lien entre volume et qualité des soins, argument avancé pour regrouper les établissements.

À chaque fermeture de bloc opératoire ou de maternité, l'accusation fuse de la part des usagers, des syndicats, des médecins ou des élus locaux : pour les pouvoirs publics, seule la logique budgétaire compte. La loi Bachelot, qui doit encourager les petits établissements voisins à se regrouper, a fait l'objet des mêmes critiques.

Le gouvernement, sans nier vouloir rationaliser les moyens - mais en se gardant de chiffrer des objectifs d'hôpitaux à fermer ou d'économies à réaliser -, avance un autre argument : un acte effectué trop rarement pose des problèmes de qualité, voire de sécurité des soins. Une étude, publiée mardi par l'Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), donne du poids à ce discours.

Maintes fois validée à l'étranger, l'hypothèse d'un lien entre volume d'activité et qualité des soins n'avait jamais été étudiée à l'échelle nationale en France, note l'Irdes.

S'appuyant sur les données exhaustives des établissements hospitaliers publics et privés en 2006, l'Institut - association financée essentiellement par l'Assurance-maladie - s'est penché sur huit cas et a observé la probabilité d'une nouvelle hospitalisation, non prévue, dans le mois suivant la sortie de l'hôpital. Il a aussi examiné le risque de décès dans ce même délai.

«Des opérations courantes»

Conclusion : «La probabilité de réadmission à 30 jours est plus élevée dans les établissements à faible volume d'activité pour six prises en charge : chirurgie du cancer du côlon, pontage aorto-coronarien, opération de résection pancréatique, infarctus aigu du myocarde, accident vasculaire cérébral et prothèse totale de la hanche. » Même chose, dans la plupart des cas, pour la probabilité de décès (voir infographie).

Cette corrélation n'est toutefois pas établie pour l'appendicectomie et ni pour la pose de stent, «qui sont des opérations courantes ». Plus étonnant, le lien volume d'activité/mortalité n'apparaît pas significatif pour les pontages. Mais peu d'hôpitaux réalisent cette intervention lourde.

Les observations de l'Irdes ne permettent pas de répondre à la question de l'œuf et de la poule : «Si un volume d'activité élevé peut conduire à l'amélioration du processus de soins et des résultats (effets d'apprentissage), de meilleurs résultats de soins dans un établissement peuvent également induire une augmentation du volume d'activité par un effet de renommée et d'orientation des patients (effet d'adressage). » Après tout, peu importe pour le patient !

L'Irdes précise que les autres caractéristiques des établissements (taille, statut public ou privé, CHU ou non…) ne semblent pas jouer sur la qualité des soins. Il nuance, enfin, les conséquences à tirer de sa démonstration : «Une forte concentration de l'activité dans de grandes structures hospitalières a des coûts, des répercussions en termes d'accès aux soins et peut engendrer des effets pervers liés aux situations de monopole. »

Rapport IRDES