mardi 10 décembre 2013

Hôpital: le jour de carence a fait chuter l'absentéisme de 40%

Le Figaro, 9 décembre 2012

http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2013/12/09/20002-20131209ARTFIG00548-hopital-le-jour-de-carence-a-fait-chuter-l-absenteisme-de-40.php

Selon l'assureur Sofaxis, les arrêts maladie d'un jour ont chuté de 40% dans les établissements hospitaliers et de 43 % dans les collectivités locales, en 2012. Un effet spectaculaire du jour de carence instauré par François Fillon mais que le gouvernement actuel prévoit de supprimer au 1er janvier.


Il n'aura pas survécu plus de deux ans, mais le jour de carence dans la fonction publique, instauré par François Fillon au 1er janvier 2012 et supprimé par le gouvernement Ayrault à partir du 1er janvier 2014, aura eu des effets spectaculaires. 
Les arrêts maladie d'un jour ont en effet chuté de 40 % dans les hôpitaux et de 43 % dans la fonction publique territoriale en 2012, selon le dernier rapport de l'assureur spécialiste des collectivités, Sofaxis. 
En outre, les arrêts de deux jours à l'hôpital ont baissé de 31,8 % et ceux de plus de trois jours, de 16,3 %. La même tendance a été observée dans la fonction publique territoriale.
Cette étude apporte un cinglant démenti à la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu. Elle avait motivé, en février 2013, la suppression de la non-rémunération du premier jour d'un arrêt maladie au motif que cette mesure était «injuste, inutile et inefficace». Or en un an, «les agents hospitaliers et territoriaux ont été moins nombreux à s'arrêter, et moins souvent».

Trois jours de carence dans le privé

Quant à «l'injustice» du mécanisme, les salariés du privé, pour leur part, n'ont pas un, mais trois jours de carence, parfois pris en charge par l'employeur. 
En réalité, le gouvernement entendait faire accepter aux syndicats de fonctionnaires le gel de leur point d'indice, acté à la fin de l'hiver dernier, pour la quatrième année consécutive.
La ministre avait d'autre part estimé que l'impact budgétaire du jour de carence était «très limité». Las, sa suppression devrait entraîner un surcoût de 60 à 75 millions pour les hôpitaux, lui avait opposé la Fédération hospitalière de France (FHF).

Voir aussi

- Carence : une abrogation injuste, inutile et inefficace. http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2013/02/21/20002-20130221ARTFIG00731-carence-une-abrogation-injuste-inutile-et-inefficace.php

jeudi 26 septembre 2013

Budget 2014 : l'Assurance-maladie encore loin de l'équilibre

LE MONDE | 
Le gouvernement a présenté, jeudi 26 septembre 2013, son deuxième budget de la Sécurité sociale depuis son arrivée au pouvoir. Il prévoit le retour du "trou de la Sécu" à son niveau d'avant-crise avec 12,8 milliards de déficit, contre des niveaux compris entre 16 et 23 milliards depuis 2009. Pour 2013, il table sur une réduction du déficit de 1 milliard par rapport aux prévisions de juin, à 16,2 milliards. 

"C'est un résultat très important, car il montre que la fatalité peut être combattue", se félicite Marisol Touraine, la ministre des affaires sociales. Sans les efforts de redressements entrepris, le déficit s'élèverait en 2014 à 21,5 milliards, estime le gouvernement.

Mais, avec ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2014, le problème spécifique du déficit de l'Assurance-maladie reste entier. Avec 6,2 milliards d'euros (contre 7,7 milliards en 2013), cette branche représentera près de la moitié du déficit de la Sécu en 2014. Mais aussi la moitié des économies, insiste la ministre.

Dans les couloirs de la Cour des comptes, on considère pourtant qu'il est urgent de s'attaquer au déficit de l'Assurance-maladie, alors que celui des branches vieillesse et famille est en voie de rétablissement. "Des gisements d'économies considérables" existent, a assuré Didier Migaud, le président de la Cour des comptes, le 17 septembre. Dans les hôpitaux, notamment.

500 MILLIONS NON DÉPENSÉS EN 2013

Alors que le gouvernement a annoncé des réformes des branches retraites et famille en 2013, dont le déficit devrait reculer respectivement à 1,2 et 2,3 milliards d'euros en 2014, la branche maladie semble, elle, encore très loin du retour à l'équilibre. 

L'augmentation des dépenses de santé devrait être contenue à 2,4 % l'année prochaine. Un taux historiquement bas, mais qu'il est possible d'atteindre, puisque depuis 2010 les objectifs de dépenses sont systématiquement respectés. Tenir cet objectif 2014 implique de réaliser près de 2,9 milliards d'économie, un montant inégalé. Cependant, le gouvernement peut compter sur 500 millions non dépensés en 2013.

Le reste des économies se fera, comme les années précédentes, via un rognage tous azimuts des dépenses. Dans le cocktail 2014, les laboratoires pharmaceutiques contribueront pour la plus grosse part, avec une économie de 960 millions d'euros constituée notamment par des baisses de prix et une modification de la tarification des génériques.

A cela s'ajouteront des baisses de prix de dispositifs médicaux pour 120 millions, des actions de maîtrise des prescriptions pour 600 millions, des baisses de tarifs des radiologues et biologistes libéraux pour 130 millions d'euros, etc. L'hôpital contribuera à hauteur de 440 millions d'euros, avec des mesures d'efficience des achats et de meilleures prises en charge des patients.

Autant dire des ingrédients très classiques. "Ce PLFSS ressemble comme deux gouttes d'eau à celui de 2013, qui ressemblait à celui de 2012, qui lui-même ressemblait pas mal à celui de 2011, à la fois en termes de montants et de types d'économies réalisées", feint de s'étonner Claude Le Pen, économiste de la santé à l'université Paris-Dauphine. Autrement dit, malgré l'alternance politique, la méthode reste la même et plutôt focalisée sur le court terme.

Différence notable avec la majorité précédente, cependant : dans le budget 2013 comme dans celui 2014, les patients sont exonérés d'effort. Conformément à ses promesses, la ministre n'a engagé aucun déremboursement ni baisse des prestations.

Les patients verront par ailleurs leur accès aux soins amélioré, avec la fixation de critères plus rigoureux pour les contrats solidaires et responsables des complémentaires santé, qui bénéficient d'une fiscalité allégée. Les dépassements d'honoraires pris en charge par ces contrats devront notamment être plafonnés. Les étudiants précaires et isolés pourront bénéficier de la CMU-complémentaire.

"NOUS FAISONS DES RÉFORMES STRUCTURELLES"

Autre nouveauté, le lancement d'un nouveau processus de paiement dans les hôpitaux : la tarification à l'activité modulable, qui sera plus avantageuse pour les petits établissements isolés, et dégressive pour les grosses structures (ce qui permettra de prévenir la "course à l'acte" pour toucher plus).

Autant de mesures qui ressemblent plus à des ajustements qu'à de véritables réformes. Pourtant, quand elle était dans l'opposition, l'actuelle ministre ne cessait de reprocher à la majorité ses économies de bouts de chandelle. En mars 2012, Marisol Touraine estimait "que derrière l'absence de réformes engagées, il y a le choix inavoué, subreptice, sans débats, de faire évoluer notre système de protection sociale vers une prise en charge accrue par les assurances privées". Députée PS, elle plaidait alors pour des réformes "de structure", inévitables selon elle.

Désormais ministre, elle assure ne pas s'être reniée. "Nous faisons des réformes structurelles. Mettre l'accent sur la chirurgie ambulatoire, valoriser la médecine de premier recours, ou, comme nous l'avons fait, instaurer le principe du tiers payant contre générique dans les pharmacies, ce qui a fait évoluer les mentalités, ce sont des éléments structurants", dit Mme Touraine.

Sa méthode repose sur la stratégie nationale de santé, présentée lundi, qui va mettre en place une meilleure coordination des soins grâce à la définition de parcours de patients. Des mesures pour l'amorcer sont inscrites dans le PLFSS, comme l'augmentation de la rémunération des médecins sur objectif de santé publique ou la hausse des expérimentations de paiement au forfait pour un travail en équipe.


De tout premiers signes auxquels les députés seront sensibles. "Il fallait absolument que dès 2014 certaines mesures de la stratégie nationale de santé entrent dans le PLFSS", explique un député de la commission des affaires sociales, inquiet qu'on puisse reprocher à la gauche de n'avoir rien changé de fondamental en dix-huit mois. 

Mais les économies que permettra potentiellement cette stratégie nationale de santé, par exemple en réduisant les hospitalisations inutiles, restent encore très floues, et lointaines.


mercredi 18 septembre 2013

Pour réduire le trou de la "Sécu", la Cour des comptes cible l'optique et les hôpitaux

Le Monde.fr avec AFP / 17 septembre 2013

La Sécurité sociale doit accélérer le rythme des économies, en particulier pour la branche maladie, la plus déficitaire, dont le trou devrait se creuser cette année à près de 8 milliards d'euros. C'est la recommandation donnée, mardi 17 septembre, par le rapport annuel de la Cour des comptes, qui cible particulièrement l'optique, les hôpitaux et les laboratoires.

La Cour, qui s'inquiète du "coup d'arrêt" dans la réduction des déficits observé en 2013 en raison de la crise, détaille les pistes d'économies possibles : "éventuel retrait" de la "Sécu" dans l'optique, développement de la chirurgie sans hébergement à l'hôpital ou révision des tarifs des analyses.

RETRAIT DE L'OPTIQUE
 
Du côté de l'optique correctrice, déjà peu remboursée et largement prise en charge par les complémentaires santé, la Cour pose la question d'un éventuel retrait de l'assurance maladie obligatoire, "dès lors que l'assurance maladie complémentaire serait généralisée". 

Cette suggestion est avant tout symbolique, l'assurance maladie ne remboursant que 200 millions d'euros au titre des dépenses d'optique, quand les complémentaires les prennent en charge à hauteur de 3,7 milliards d'euros. Pour la Cour des comptes, ce "retrait continu" de la Sécurité sociale signe "un grave échec". Mais dans un marché qu'elle juge "dynamique et opaque", elle appelle les pouvoirs publics à faire "des choix clairs", pour le rendre plus transparent et plus concurrentiel.

PLUS DE CHIRURGIE AMBULATOIRE
 
Autre piste d'économies, selon la Cour, les hôpitaux, auxquels elle consacre cinq chapitres de son rapport. Il s'agit notamment de développer la chirurgie ambulatoire, c'est-à-dire les actes chirurgicaux pratiqués à l'hôpital, avec la sortie le jour même du patient.

Quatre interventions sur dix sont pratiquées sur ce modèle en France, contre huit sur dix dans plusieurs pays "qui nous sont comparables". La Cour souligne que le développement de cette pratique permettrait d'économiser 5 milliards d'euros.

 RÉORGANISATION DE LA BIOLOGIE MÉDICALE
 
Des efforts peuvent également être réalisés dans les dépenses liées à la biologie médicale, dont le coût représente 6 milliards d'euros pour l'assurance maladie. La récente réorganisation des laboratoires "est encore bien trop timide pour faire baisser les coûts", relève la Cour, qui réclame aussi un meilleur encadrement des examens et une "politique tarifaire plus étroitement en cohérence avec les gains de productivité du secteur".

L'objectif est d'agir à la fois sur la tarification des actes et sur leur nombre. "Une économie de l'ordre de 500 millions d'euros (...) pourrait résulter rapidement d'actions dans cette double direction", juge l'institution.






mardi 3 septembre 2013

Le plan cancer 3 luttera contre les inégalités

Par damien Mascret - le 02/09/2013 
 
Le rapport du Pr Vernant recommande de rembourser intégralement tous les soins pour les patients atteints de cancer.

Le troisième plan cancer (2014-2018) se précise avec les recommandations que vient de faire le Pr Jean-Paul Vernant, dans un rapport destiné au ministère des Affaires sociales et de la Santé et au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

Les ministres respectifs, Marisol Touraine et Geneviève Fioraso ont souligné vendredi «l'important travail réalisé et les pistes de réflexion mises en avant» dans un communiqué commun, mais sans vraiment se prononcer sur le plan cancer 3 ainsi esquissé par le professeur d'hématologie de l'université Pierre-et-Marie-Curie.

Il faut dire que certaines mesures préconisées seront bien difficiles à financer et que l'offensive menée contre la médecine libérale et le dépistage individuel des cancers n'est pas sans risque politique.

Supprimer les restes à charge

«Les dépassements d'honoraires et le reste à charge pouvant être imposés aux patients atteints de cancer sont sources d'inégalités à la fois en termes de liberté de choix mais aussi en termes de délais de prise en charge», souligne l'un des axes du rapport.

Les «restes à charge» sont des dépenses de soins ou d'équipements non remboursés. Une inégalité que le plan cancer 3 devra donc corriger s'il veut atteindre l'objectif de réduction des inégalités sociales de santé fixé par le président de la République lors de l'annonce de plan cancer, le 4 décembre dernier.

Car si dans les centres de lutte contre le cancer (CLCC) les patients ne sont pas soumis à des dépassements d'honoraires, puisque les médecins qui y travaillent ne peuvent pas y avoir d'activité privée, il n'en va évidemment pas de même dans les établissements publics et le secteur libéral, ou elle est autorisée.

Le rapport décrit d'ailleurs avec franchise sa vision de la médecine hospitalière: «En attendant que, s'alignant sur les CLCC, l'hôpital public voit disparaître à terme son activité privée, il est impératif que, comme dans le secteur libéral, il n'y subsiste plus de reste à charge pour les patients traités pour un cancer». Comment? En l'imposant, explique naïvement le rapport, y compris aux anatomo-pathologistes, biologistes et radiologues.

Investir dans le dépistage et la prévention

Le rapport risque de donner des sueurs froides à Bercy tant les investissements proposés y sont nombreux: par exemple supprimer le reste à charge pour les examens complémentaires après une mammographie réalisée dans le cadre du dépistage organisé ; idem pour les consultations ou la coloscopie en cas de test positif dans le dépistage du cancer colorectal ; prendre en charge à 100 % les vaccins contre l'hépatite B ou l'HPV (papillomavirus) destinés à éviter certains cancers du foie et du col de l'utérus ; améliorer le parc d'IRM pour combler les retards de la France (592 appareils installés pour des besoins estimés à 970).

Comment financer tout cela? «À côté de ce qui représente des investissements, il y a des pistes d'économie, notamment dans les restructurations», assure le Pr Véronique Trillet-Lenoir, oncologue médicale au CHU de Lyon Sud, qui a contribué au rapport.

Privilégier le dépistage organisé

La France a la particularité de laisser coexister deux types de dépistage des cancers: l'un, organisé, basé sur un rythme régulier pour des populations et des tranches d'âge bien définies, l'autre, dit individuel, puisque laissé à la discrétion du médecin pour un patient donné.

D'un côté, schématiquement, les épidémiologistes et les médecins de santé publique pour qui seul le dépistage organisé, lorsqu'il est validé par de grandes études, mérite d'être financé par la collectivité.

C'est par exemple le cas pour le cancer du sein ou le cancer colorectal, mais pas pour le cancer de la prostate. De l'autre, les médecins de terrain qui sont convaincus des bienfaits de dépister leurs patients.

Les deux dépistages sont aujourd'hui pris en charge par l'Assurance-maladie mais le rapport Vernant franchit le Rubicon en proposant par exemple dans le cancer de la pros­tate de «supprimer le remboursement du dosage de PSA réalisé sans symptôme chez les hommes sans risque élevé».

Pour le Pr Trillet-Lenoir, «c'est une bonne façon de faire de la santé publique, on incite à ne pas faire ce qui est inutile».

Le rapport propose aussi de mettre en place un dépistage organisé pour le cancer du col de l'utérus et d'étudier l'intérêt de prolonger au-delà des 75 ans actuels le dépistage du cancer colorectal pour tenir compte de l'allongement de l'espérance de vie.

samedi 24 août 2013

Plan cancer 2: bilan mitigé

La Direction générale de la Santé (DGS) a rendu son bilan, le jeudi 22 août 2013. 

Le résultat du deuxième Plan cancer 2009/2013 reste mitigé d’après la Direction générale de la Santé (DGS) dans un rapport publié jeudi 22 août 2013.

Entre 2009 et 2012, 85% des moyens ont été mobilisés et sur les 118 actions prévues, 60% ont été tenues.

Le troisième plan cancer est lancé depuis décembre 2012 et permettra de pallier aux manques du deuxième. Cependant il est important de noter que les soins sont de meilleure qualité et plus sûrs dans toute la France.

Le nombre de volontaires pour les essais cliniques a augmenté de 72%.

L’accès à une médecine personnalisée est plus facile.

Il reste des objectifs non atteints:

- La coordination entre les hôpitaux et les médecins de ville pour le suivi personnel des soins et de l’après-cancer reste encore à améliorer.

- L’accompagnement des malades dans leur vie personnelle comme professionnelle doit être encore travaillé.

- La cause principale des décès du cancer est le tabac, ce dernier est en augmentation chez les chômeurs et chez les femmes.

- La France maque d’appareil IRM, imagerie par résonance magnétique, par rapport à d’autres pays européens. Elle en compte 10,1 par million d’habitants alors que le Danemark et l’Allemagne en ont en moyenne 30 par millions d’habitants. La principale conséquence de ce manque d’appareil est l’attente d’un mois pour passer un examen alors que le Plan cancer pour 2010 avait prévu de le réduire par deux.

- Ils restent encore de nombreuses inégalités auxquelles devrait pallier le troisième Plan cancer de 2014/2018.

Références

- http://www.lasantepublique.fr/politiques-publiques-et-organisation-des-soins/24082013,le-deuxieme-plan-cancer-bilan-mitige,681.html


mercredi 13 février 2013

Assurance maladie en 2012 : + 2,3 %. Ville : + 0,5 %. Hôpital : + 4,5 %!

Par Philippe Leduc, 10 janvier 2013
http://lecercle.lesechos.fr/economie-societe/social/sante/221165286/assurance-maladie-2012-23-ville-05-hopital-45

Présentées ainsi, les données de l’Assurance maladie pour 2012 ne manqueront pas de poser question. Car ce sont les soins de proximité, de ville que les Pouvoirs publics veulent développer. C’est l’hôpital auquel il convient de donner sa "juste" place, celle qui relève de la haute technicité. Et c’est l’inverse qui se produit. Pourquoi un tel échec ? Comment inverser la tendance ? Ces résultats sont d’autant plus étranges qu’on ne peut nier que les restructurations hospitalières n’ont cessé de se succéder et que nombre de lits ont déjà été fermés sur tout le territoire.

Rien qu’à Paris, Broussais, Boucicaut, Laennec, Saint Vincent de Paul ont été fermés. En outre, ici ou là, l’hôpital souffre, comme à Avicenne, en Seine Saint-Denis où France Inter avait planté ses micros jeudi dernier dans le service d’urgence et invité la ministre de la santé. Les urgentistes déploraient le manque de moyens pour, en particulier, orienter les malades. Ainsi, l’hôpital "consomme" de plus en plus et pourtant sa situation se dégrade ou à tout le moins ne s’améliore pas, avec bien sûr de fortes disparités régionales.

L’hôpital développe tellement son activité et donc ses coûts que les Pouvoirs publics prévoient pour cette année de baisser ses tarifs. Effet pervers de la T2A, tarification à l’activité, dont le caractère inflationniste pervers est désormais admis et que le gouvernement s’est engagé à réformer. À l’inverse, si l’on peut dire, la médecine libérale ne "consomme" pas tous les crédits qui lui ont été alloués, elle est en deçà de l’Objectif national de dépenses de l’Assurance Maladie, l’Ondam, voté chaque année par le Parlement.

Ainsi la réalité des chiffres est exactement le contraire de ce que préconisent les Pouvoirs publics : "conforter, renforcer et réorganiser la médecine de proximité" pour faire face au vieillissement de la population et à la croissance des maladies chroniques et "préciser la juste place de l’hôpital". Ceci n’est pas nouveau. Pourquoi un tel échec des politiques publiques et comment en sortir ?

Une solution simple pourrait être de confier la gestion de l’Hôpital à l’Assurance maladie qui a si bien réussi, financièrement parlant, avec les soins en ville dont elle a la charge et qui n’a augmenté que de 0,5 %. Impensable, l’État ne se dessaisira pas de ce rôle, aujourd’hui moins que jamais. Ou bien, faut-il écouter les suggestions de professionnels de santé ? Les médecins de ville qui disent : "donnez-nous des moyens supplémentaires, vous allez voir ce que vous allez voir". En fait, l’argent ils l’ont et on a bien vu qu’ils n’ont pas été en mesure de l’utiliser, dans le schéma actuel.
Les hospitaliers qui défendent l’idée d’un hôpital hors les murs qui pourrait intervenir en ville là où les médecins libéraux font défaut, ce qui permettrait de désengorger les établissements, en particulier les urgences. Ce n’est peut-être pas la première mission à confier à l’hôpital, il reste tant à faire avant pour mieux organiser l’hôpital, en particulier pour engager un véritable développement de la chirurgie ambulatoire, source de qualité et d’économie.
Les cliniques privées qui disent : "nous, on coûte moins cher" et il faut donc progressivement rapprocher les tarifs du public et du privé, ce que justement la ministre de la Santé vient de stopper net en abandonnant cette convergence tarifaire, il est vrai délicate à mettre en œuvre tant les missions de ces deux secteurs de l’hospitalisation répondent à des exigences qui ne sont pas aussi simplement comparables.

Le patient, maitre du jeu

En fait la question à se poser n’est-elle pas tout autre ? Dans notre système de santé non organisé où les structures de soins sont juxtaposées les unes à côté des autres et agissent indépendamment les unes des autres, c’est en fait le Patient qui choisit sans contraintes ni obligation. Pourquoi va-t-il à l’hôpital, surtout aux urgences ? Parce que, et là aussi c’est bien connu, l’hôpital est ouvert 24h/24, sans rendez-vous, il dispose de tout l’équipement pour explorer et traiter les cas les plus difficiles. Point n’est besoin de bourse délier. Et pourquoi y reste-t-il si longtemps ? Car les places en soins de suite font défaut.

C’est le patient qui décide et sans politique coercitive "à l’anglaise", ce qui est aujourd’hui inenvisageable en France, comment le convaincre d’utiliser "intelligemment" le système de soins ? Il n’y a pas de secret. La seule solution c’est de proposer aux patients une organisation adaptée et "attrayante" qui doit l’inciter à consulter d’abord son médecin de proximité, de ville. Praticien qui sera en capacité de lui prodiguer non pas un soin ponctuel, mais une prise en charge globale : prévention, éducation thérapeutique, aide médicosociale, orientation dans le système de soins, coordination des différents professionnels de santé et programmation des interventions par exemple d’un acte chirurgical pour éviter de recourir précipitamment aux urgences, surtout pour les personnes âgées.

Ce n’est assurément pas un professionnel libéral seul et isolé qui pourra assumer toutes ces fonctions. C’était un peu l’idée de la réforme de 2004 et le concept de "médecin traitant" et de "Parcours de soins coordonnés" toujours en vigueur, mais qui se limite à un moindre remboursement en dehors de ce cheminement et qui par là même a montré son insuffisance notoire. D’où l’idée des maisons et pôles de santé qui fait flores actuellement, mais cela ne représente que 2 % à 3 % de l’offre de soins et leur développement est difficile et couteux. Cent fois sur le métier il faut remettre l’ouvrage.

Il y a urgence

Dans sa déclaration de Grenoble, le premier ministre, le 8  février dernier, à l’occasion de la présentation de sa "stratégie nationale de santé" a fait le bon diagnostic. Certes, ce n’était pas très difficile. La rude tâche de trouver l’organisation du désormais fameux "Parcours de soins et de santé" qui permettra à la fois une meilleure qualité et aussi une plus efficace utilisation des deniers revient à un Comité des sages. "Cela ne sera pas l’œuvre de quelques mois, mais de cinq ans voire des dix ans si nous voulons pleinement réussir", a courageusement dit Jean Marc Ayrault.

En fait, l’objectif du Comité des sages est simple : stimuler la mise en place d’une véritable coordination des soins et d’une prise en charge globale et intégrée qui va de la prévention aux contraintes médicosociales. Il devra non pas sortir de son chapeau LA solution miracle, mais en fonction de la réalité du terrain, proposer différentes possibilités associées pour chacune d’entre elles à de puissants leviers de gestion du changement, mais aussi d’ordre financier.

Et, contrairement à ce que pense le premier ministre, il y a urgence, au moins pour engager le processus, tant du point de vue de la qualité des prises en charge que de la soutenabilité financière du système qui conditionne sa pérennité.

 

mercredi 6 février 2013

Financement des dépenses de santé : 6 mois pour réformer, pas un de plus

http://lecercle.lesechos.fr/economie-societe/social/sante/221164745/financement-depenses-sante-6-mois-reformer-plus

Philippe Leduc - Directeur


L’air de rien, le Gouvernement s’est fixé un calendrier particulièrement ambitieux pour mettre au clair sa politique de financement des dépenses de santé. 6 mois, pas un de plus. Le filet se resserre, il va falloir trancher ! Le dernier avis du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) vient à point nommé.

 En fait, la valse des idées préconçues se fera en trois temps au cours de ce semestre.

Tout d’abord, il faudra tenir compte du récent avis du HCAAM qui très opportunément vient rappeler en un avis concis de 9 pages les "principes de solidarité de l’assurance maladie" et qui compte bien apporter sa contribution à la prise de décision.

Son programme pour 2013 en donne un avant-gout : au-delà de l’accès aux soins et du Parcours de soins, le HCAAM proposera d’une part des projections à long terme des dépenses d’assurance maladie et d’autre part une réflexion "actualisée" sur le rôle et la place des complémentaires santé dans la couverture du risque maladie.

Sur ce dernier point, dans son avis adopté à l’unanimité (c’est une tradition) le 24 janvier 2013, le HCAAM rappelle que "la solidarité de l’assurance maladie obligatoire entre bien portants et malades est une solidarité face aux frais de la maladie pour que ceux-ci ne soient pas un obstacle à se soigner.

Elle peut donc s’accompagner d’un certain niveau de frais tant qu’ils ne sont pas à l’origine d’un renoncement à des soins nécessaires. Le reste à charge après remboursement de l’assurance maladie obligatoire ne doit pas être trop élevé pour certaines personnes, notamment celles ayant de bas revenus.

C’est pourquoi le système de solidarité entre bien portants et malades est complété, depuis l’origine, par une mutualisation assurantielle, dont les règles sont distinctes".

Aujourd’hui, les recettes du régime de base sont essentiellement de trois types, 46 % pour les cotisations sociales (qui ne sont donc plus majoritaire) 35 % pour les contributions sociales (CSG et CRDS) et 14 % les impôts et taxes.

Quant aux recettes des régimes complémentaires, elles se fondent sur des règles différentes, leur organisation par définition est beaucoup plus complexe, car soumis au poids de l’histoire, en partie aux lois du marché et aux contraintes réglementaires.

C’est à cette situation hétérogène d’une famille d’opérateurs à une autre (mutuelles, assureurs et instituts de prévoyance) que les Pouvoirs publics veulent mettre un peu d’ordre, tel que l’a annoncé la première ministre.

Grande concertation

Le deuxième temps sera ainsi cette "grande concertation avec les organismes complémentaires pour que tous les Français puissent acquérir une couverture complémentaire de qualité" qui devra aboutir selon les vœux de Jean-Marc Ayrault à un accord avant la fin du mois de juin afin que les dispositions nécessaires soient intégrées dans le Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale 2014.

La question de l’aide à l’acquisition d’un complémentaire santé (ACS) aussi inefficace que couteuse devra, en particulier, être posée.

Pourquoi tant d’efforts vains devraient ils être maintenus alors que l’obligation résoudrait à peu de frais cette problématique et ce d’autant plus que le récent accord du 11 janvier 2013 sur la flexisécurité va l’imposer pour les salariés. Alors pourquoi pas pour les jeunes, les chômeurs et les retraités ?

Le troisième point fort de la réforme du financement des dépenses de santé interviendra aussi au printemps avec les recommandations attendues du Haut Conseil du Financement de la Protection sociale.

Trois objectifs lui ont été assignés par le premier ministre. Assurer la pérennité du système de protection sociale avec le retour à l’équilibre des Comptes sociaux. En clarifier le financement en distinguant mieux ce qui relève d’une logique contributive et ce qui relève de la solidarité nationale (vaste sujet).

Et enfin prendre en compte la réalité économique et donc le cout du travail ("77 % du financement global de la protection sociale pèse sur les salaires").

On peut d’ores et déjà supputer, comme le Président de la République l’a laissé entendre au cours de sa conférence de presse du 13 novembre 2012 que la TVA ayant été déjà mise à contribution, cela sera au tour de la CSG d’être augmentée, si besoin est.

Calendrier chargé, mais surtout perspectives fondamentales, car ce dont il s’agit ce n’est pas d’un coup de baguette magique de trouver des financements à un puits sans fond, mais de mettre un peu d’ordre et de cohérence dans une vision vertueuse d’efficience et sur la durée.