mercredi 21 septembre 2011

Les députés se penchent sur l'activité des visiteurs médicaux

Le Monde, 20 septembre 2011

Mardi 20 septembre, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale examine pour la deuxième fois le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. Une loi qui a pour objectif "de redonner confiance aux Français dans notre système du médicament", selon les dires de son instigateur, le ministre de la santé, Xavier Bertrand.

Grâce à ce texte, présenté comme une "refonte" du système, le gouvernement entend réformer la profession des visiteurs médicaux. Ces représentants des laboratoires pharmaceutiques vont à la rencontre les médecins pour vanter les mérites des derniers produits mis sur le marché par leur société, et accessoirement les vendre.

Si le texte est voté en l'état, les visiteurs médicaux devront s'adresser à un collège de médecins et non plus à un seul praticien, en face à face. Une mesure expérimentale, qui ne sera tentée qu'en milieu hospitalier pendant deux ans, les médecins de ville n'étant pas concernés pour le moment.

UNE MESURE "INAPPLICABLE"

"Inapplicable", tonne Catherine Lemorton, qui suit le projet de loi pour le compte du groupe socialiste, radical et citoyen à l'Assemblée nationale. La député, également pharmacienne à Toulouse, s'interroge et pointe du doigt une méconnaissance du milieu hospitalier : les médecins et les spécialistes sont rarement disponibles tous ensemble au même moment, affirme-t-elle en substance.

Jean-Luc Préel, député Nouveau Centre et par ailleurs ancien chef de service hospitalier, ne dit pas autre chose. "L'idée de visites médicales à l'hôpital devant plusieurs professionnels de santé qui, tous, manquent de temps, me laisse dubitatif. Comment s'organiseront-elles ?", a-t-il interrogé en commission. Réponse du ministre Xavier Bertrand : "La suppression du cadre individuel peut soulever des difficultés pour les petits hôpitaux locaux, mais on ne peut pas accepter le maintien du statu quo. La visite médicale, telle que nous l'avons connue, a vécu."

Si Catherine Lemorton comprend la logique du gouvernement – les visites collectives doivent permettre de réduire les abus –, elle regrette que le débat se focalise sur cette profession. "Ils ne sont qu'un maillon de la chaîne. Après tout, ils ne sont que les messagers d'une direction. En faire des boucs émissaires serait vraiment malhonnête", insiste-t-elle, avant de rappeler la responsabilité des médecins, parfois trop influençables.

DE MOINS EN MOINS DE VISITEURS MÉDICAUX

Contrairement à ce que préconise l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), les deux élus ne militent pas pour la disparition pure et simple des visiteurs médicaux. "Quel gouvernement prendrait la responsabilité sociale de provoquer le licenciement de 18 000 personnes ?", demande Catherine Lemorton. Les reconvertir en agents publics de l'information sur le médicament ? "L'État n'en a pas les moyens", répond-elle.

"Pourquoi ne pas imaginer que la Haute Autorité de santé explique aux médecins la marche à suivre en développant les logiciels de prescriptions ?", demande Jean-Luc Préel. Autre solution avancée par l'élue socialiste : "Il faudrait utiliser cette force de frappe pour faire remonter auprès des centres régionaux de pharmacovigilance les effets secondaires et indésirables des médicaments."

Problème : cela reviendrait à demander aux visiteurs médicaux de "dénoncer" leurs employeurs. Pas sûr qu'ils soient d'accord. Réforme ou pas, le nombre de visiteurs médicaux décroît inexorablement. Ils étaient 25 000 en 2004, ils ne sont plus que 18 000 en 2011. En cause, la multiplication des médicaments génériques, la signature d'une charte encadrant leur profession et les fusions entre laboratoires.

Et l'hémorragie n'est pas finie. Après avoir licencié quelque 700 personnes en 2008, principalement des visiteurs médicaux, le laboratoire Pfizer promet, mardi, les licenciements de 225 personnes supplémentaires en France. Sa justification ? La réforme de la visite médicale défendue par le gouvernement.

Thomas Monnerais

dimanche 18 septembre 2011

Dépenses de santé : plus de médicaments déremboursés

Le Figaro, 18 septembre 2011

Les grandes lignes du budget 2012 de la Sécurité sociale seront présentées jeudi 21 septembre 2011.

Réduire le «trou» de 95,7 milliards d'euros de l'État demandera du temps. Prendre de nouvelles mesures sur les retraites donnerait l'impression que la réforme de 2010 était insuffisante. Et le gouvernement n'a pas la main sur les finances des collectivités locales.

Pour donner un signal visible de baisse des déficits publics avant la présidentielle, le gouvernement a donc une priorité: l'Assurance-maladie. Son trou sera «divisé par deux entre 2010 et 2012», a déjà promis la ministre du Budget et des Comptes publics, Valérie Pécresse. Ce qui devrait le réduire à moins de 6 milliards d'euros.

Pour cela, l'Assurance-maladie bénéficiera de recettes supplémentaires: elle récupérera une bonne partie des 10 milliards de prélèvements supplémentaires annoncés, fin août 2011, par François Fillon. Mais elle devra aussi faire un effort sur ses dépenses. L'objectif sera de contenir leur hausse à 2,8% (contre 2,9% cette année), ce qui suppose 2,2 milliards d'économies par rapport à la progression spontanée.

La répartition de ces économies sera présentée jeudi par le gouvernement, qui dévoilera les grandes lignes du projet de budget 2012 de la Sécurité sociale, en même temps que les dernières prévisions de déficit, qui sera inférieur à 18 milliards d'euros pour 2011. C'est l'industrie du médicament qui devrait être la première mise à contribution.

Les baisses de prix, qui ces dernières années tournaient autour de 500 millions d'euros par an, seront plus proches cette année de 650-700 millions, selon les notifications déjà adressées aux laboratoires. S'y ajouteront des déremboursements.

Alors que, par le passé, il avait souvent transigé, inventant notamment une «vignette orange» remboursée à 15 % par la Sécu, le gouvernement ne devrait plus hésiter, cette fois, à dérembourser complètement les médicaments inefficaces.

La mise en garde des laboratoires

Depuis l'affaire Mediator, les Français n'ont plus une foi absolue dans les médicaments, ce qui devrait rendre moins difficile une telle mesure.

Avantage annexe: tout comme les baisses de prix, les exclusions du remboursement font également réaliser des économies aux complémentaires, car elles aussi sortent les médicaments concernés de la liste des produits qu'elles prennent en charge. Or le gouvernement veut se réconcilier avec les complémentaires, après leur avoir infligé un milliard d'euros de taxe supplémentaire.

Le Leem, la fédération professionnelle des laboratoires, souligne que ces mesures coïncideront en 2012 avec l'expiration de nombreux brevets, représentant selon ses estimations 1,2 milliard de chiffre d'affaires, contre une moyenne de 700 à 800 millions les années précédentes.

En ajoutant à cela le projet de loi sur le médicament rédigé par le ministre Xavier Bertrand après le scandale du Mediator, le Leem craint l'an prochain un recul -inédit- du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique, qui pourrait atteindre 1% ou 2%.

En outre, les prélèvements devraient augmenter: en vue, un relèvement de la taxe spéciale sur le chiffre d'affaire des laboratoires (actuellement fixée à 1%, elle pourrait revenir vers son niveau d'autrefois, soit 1,7 %) et une contribution nouvelle pour financer indirectement la formation continue des médecins, via l'État.

Le Leem met en garde contre de nouvelles réductions d'effectifs, notamment chez les visiteurs médicaux, et contre un «climat de défiance» qui pousserait les grands laboratoires internationaux à préférer d'autres pays pour investir dans la recherche ou la production.

vendredi 16 septembre 2011

Attirer les futurs praticiens vers les déserts médicaux

Le Figaro, Septembre 2011

Le gouvernement veut faire plus que les 148 contrats signés l'an dernier.

Face aux déserts médicaux, le gouvernement a renoncé à toute mesure obligeant les médecins libéraux à travailler en zone sous-dense - y compris à celles qu'il avait fait voter au début du quinquennat. Le risque est trop grand de décourager un peu plus les vocations, de généralistes notamment, considère-t-il.

Face aux déserts médicaux, le gouvernement a renoncé à toute mesure obligeant les praticiens libéraux à aller travailler en zone sous-dense, y compris aux mesures qu'il avait fait voter au début du quinquennat. Le risque est fort, estime-t-il, de dissuader les vocations, notamment de généralistes. Il s'attache désormais à promouvoir les mesures incitatives récentes.

La secrétaire d'État à la Santé, Nora Berra, se rend aujourd'hui à la faculté de médecine de Dijon pour y vanter le «contrat d'engagement de service public» , innovation de la loi Bachelot de 2009.

Son principe : un étudiant en médecine peut recevoir, dès sa deuxième année d'études, une allocation de 1 200 euros bruts mensuels jusqu'à la fin de son cursus.

En échange, il s'engage à s'installer dans une zone manquant de médecins (campagne ou banlieue, le plus souvent) et à y exercer pendant une durée équivalente.

Pour 2010-2011, année universitaire d'entrée en vigueur du dispositif, 400 contrats étaient budgétés. Au final, 148 ont été signés.

«C'est un bon score, sachant que la mesure a été lancée tard, juste avant l'été 2010. L'élan est donné», estime Nora Berra. Les volontaires sont, aux deux tiers, des étudiants en début de parcours - plutôt que des externes ou des internes, qui reçoivent déjà une rémunération de l'hôpital.

«Ne plus avoir à se préoccuper du financement de leurs études leur permet de se concentrer sur leur projet professionnel, poursuit la secrétaire d'État.

Et souvent de se rendre compte que travailler dans ces zones répond à leurs aspirations : qualité de vie, exercice en groupe, temps partiel auquel aspirent beaucoup de femmes, et l'idée d'être un vrai médecin de famille.»

Autre avantage, même si ce n'est pas l'objectif premier du dispositif : «Il encouragera les jeunes issus de familles modestes à s'engager dans un cursus long, donc coûteux.»

Communication à renforcer

Le succès de ce contrat est pourtant très inégal : 93 % des contrats disponibles ont trouvé preneur en Bourgogne, 79 % en Picardie, 67 % en Limousin et dans le Centre, mais 10 % en Bretagne et aucun en Languedoc-Roussillon.

Pour Nora Berra, ces écarts s'expliquent par la méconnaissance du dispositif : certaines agences régionales de santé l'ont moins promu que d'autres. La communication va être renforcée.

Un autre frein vient d'être levé : les signataires ont désormais la certitude d'être affectés dans leur région d'études, et ne courront donc plus le risque - assez théorique - de se voir imposer une installation à l'autre bout de la France, sauf à exprimer eux-mêmes ce souhait.

En 2011-2012, 400 nouveaux contrats seront proposés, et autant les années suivantes. Le coût pour l'État culminera à 29 millions d'euros par an en 2015.

jeudi 15 septembre 2011

Le nouveau projet de loi sur le #medicament

#bigphrmas #labos

Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, devant la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, le 13 septembre 2011

- Le projet de loi sur le médicament constitue "une réforme en profondeur", qui répond à "un seul et unique objectif : protéger le patient".
- "La réforme a une ambition importante : redonner confiance aux Français dans notre système du médicament.".
- "Il ne s'agit pas d'une loi comme les autres, elle fait suite au scandale du Mediator. Elle concerne potentiellement chacun de nos concitoyens.".
- "Nous avons voulu une réforme en profondeur, qui ait du sens, dans un seul et unique objectif : protéger le patient.", a-t-il ajouté.
- Cette réforme, "qui refonde le système de sécurité sanitaire des produits de santé", "est un tout".
- "Il y a la loi, il y a les décrets, il y a le fonctionnement de l'Afssaps et il y a aussi la dimension européenne".
- "J'aurai à coeur de prendre des amendements".
- Il a également exprimé le souhait que soit décidée, "dès maintenant, une évaluation complète de cette loi et de son application", dans deux ou trois ans.
- Le ministre a par ailleurs affirmé travailler à "une nouvelle loi sur les droits des patients", en relais de la loi Kouchner de 2002.

Références

- Un nouveau projet de loi sur le médicament, Le Point, 13 septembre 2011

Les répliques sans fin de l'affaire du #Mediator...

L’affaire du Mediator n’en finit plus de créer des répliques. Elle jette une lumière crue sur les relations incestueuses entre l'industrie pharmaceutique, les agences de régulation et les élites hospitalo-universitaire françaises.

L’affaire Griscelli est la dernière en date de ces répliques. Elle a créé une émotion considérable dans la communauté médicale française.

HAS et conflits d'intérêts

Jean-Luc HAROUSSEAU, le président de la HAS, lors de sa prise de fonction le 31 janvier 2011, a rendu une déclaration d’intérêt vierge. Le 21 février 2011, la veille de la publication d’un article du Canard et d'un reportage de France Culture, Jean-Luc Harousseau publiait en annexes adressées aux présidents des Commissions des affaires sociales du Sénat et de l’Assemblée nationale, la liste de ses liens d’intérêts personnels et institutionnels des trois dernières années avec l’industrie et leurs montants : en tout plus de 10 millions d’euros de rémunération ! (Source FORMINDEP).

Développements 

Pour mémoire, Le Figaro publie le 13 septembre 2011 des écoutes téléphoniques entre Claude Griscelli et Jean-Philippe Seta, directeur opérationnel de Servier. Les deux hommes sont manifestement trés proches et se tutoient. Ils discutent du rapport du Sénat sur l’affaire du Mediator.

Claude Griscelli dit: «Je me suis fichu des choses nulles, mais bien sûr j’ai regardé des phrases clés qui concernaient la responsabilité de Servier… Et donc j’ai fait changer pas mal de choses». Seta réagit: «Décidément, je n’ai même pas besoin de te donner des conseils, tu anticipes, c’est parfait».


Selon des écoutes téléphoniques, l'intervention de M.Griscelli aurait eu pour effet de minimiser les responsabilités du laboratoire dans le document final. 

Le sénateur et président de la mission d'information sur le Mediator, François Autain (divers gauche), a demandé jeudi 15 septembre 2011 au président du Sénat, Gérard Larcher, de saisir le comité de déontologie parlementaire après avoir appris que Marie-Thérèse Hermange, rapporteur (UMP) de la mission, a consulté Claude Griscelli, professeur de médecine et ami du directeur exécutif de Servier, au moment de la rédaction de son rapport sur le système du médicament. 

Même si les modifications "revêtent, par rapport à l'ensemble du contenu du texte, une importance marginale", précise M. Autain, cette affaire "jette le discrédit non seulement sur un travail que certains considéraient jusque-là comme exemplaire, mais aussi sur notre institution".

Liens

- L’étonnante conception de la HAS et de l’Afssaps, formindep

- Douste-Blazy, Bapt, Harousseau : Touchez pas au grisbi des médecins politiques!, par Pharmaleaks, agoravox.fr, 24 juin 2011

- J-L Harousseau : " Nous devons montrer l’exemple", lepharamacien.fr, juin 2011

Références

Le président de la mission d'information sur le Mediator interpelle le président du Sénat, Le Monde, 17 septembre 2011

- Scandale Mediator - Claude Griscelli : "Je n'ai eu aucun rôle dans ce rapport", Le Point, 14 septembre 2011

- Mediator : le professeur Griscelli se défend d’avoir fait modifier le rapport sénatorial, France-Info, 14 septembre 2011

- Mediator: la chute d'un grand pédiatre, La plume et le bistouri, 14 septembre 2011

- Mediator : comment Servier a corrigé le rapport du Sénat, Le Figaro, 14 septembre 2009

- Mediator : des auditions accablent le laboratoire Servier, Le Figaro, 5 septembre 2011

- Mediator : ce que Jacques Servier a déclaré aux parlementaires, Le Figaro, 3 mars 2011

- Deux missions parlementaires sur le Mediator, Le Figaro, 15 février 2011

mercredi 14 septembre 2011

Les Français dépensent 2700 euros par an en soins

Le Figaro, 14 septembre 2011

Les ménages en paient directement 9,4%, ce qui reste peu comparé à nos voisins.

En cinq ans, 25 milliards de plus ! La «consommation de soins et biens médicaux» a atteint 175 milliards d'euros l'an dernier, selon la Commission des comptes de la santé.

Ce montant regroupe soins hospitaliers (une petite moitié du total), soins de ville (un quart - 25%), médicaments (un cinquième - 20%), prothèses, seringues et autres pansements, et transports de malades. La dépense atteint ainsi 2698 euros par habitant.

Si l'on y ajoute prise en charge des personnes dépendantes, arrêts maladie ou maternité, prévention, recherche, formation des professionnels de santé et coûts de gestion, l'enveloppe atteint 234,1 milliards, soit 3609 euros par habitant.

La part financée par la «Sécu» reste stable.

vendredi 9 septembre 2011

Déficit historique pour la Sécurité sociale

Le Point.fr - 08/09/2011

La Cour des Comptes s'alarme, dans un rapport publié jeudi, du déficit historique atteint en 2010 par les comptes sociaux (Sécu et Fonds de solidarité vieillesse / FSV) à près de 30 milliards d'euros, un niveau record pas seulement dû à la crise.

"Jamais le déficit de la Sécurité sociale n'a atteint un niveau aussi élevé qu'en 2010. A 29,8 milliards le déficit cumulé des régimes de base et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) a un caractère historique. Il a plus que triplé en deux ans", souligne le rapport annuel de la Cour sur la Sécurité sociale.

"Le niveau exceptionnellement élevé des déficits ne s'explique que partiellement par la crise économique. Moins de la moitié de celui du régime général provient de la faiblesse de la conjoncture", selon la Cour qui précise que sur le 1,2 point de Produit Intérieur Brut (PIB) qu'a représenté en 2010 le déficit du régime général, les "facteurs structurels" ont compté pour 0,7 point.

Selon la Cour, les déficits se sont aggravés en 2010 dans toutes les branches de la Sécu (maladie, famille, retraites, accidents du travail/maladies professionnelles).

"Anomalie" de la dette sociale (Cour des Comptes)

De son côté le FSV (fonds de solidarité vieillesse), qui verse le minimum vieillesse pour les personnes âgées ne touchant pas de retraites, est "chroniquement sous-financé".

De plus, pour la branche vieillesse, les magistrats de la rue Cambon tirent la sonnette d'alarme à propos du régime des exploitants agricoles dont le déficit, qui a dû être financé par recours à un emprunt bancaire, "est également très préoccupant".

L'accumulation des déficits, d'année en année, fait gonfler la dette sociale qui a atteint un total de 136,2 milliards fin 2010.

Cette dette sociale "représente en elle-même une anomalie", estime la Cour qui constate que "aucun de nos grands voisins européens n'accepte de déséquilibres durables de sa protection sociale".

La Sécu «droguée» à la dette, selon la Cour des comptes

La Sécu «droguée» à la dette, s'alarme Migaud, Le Figaro, 9 septembre 2011 Le rapport annuel de la Cour des comptes insiste une nouvelle fois sur la nécessité de faire des économies. La crise, certes, mais pas seulement. La Sécu a enregistré l'an dernier un déficit historique frôlant 30 milliards d'euros (y compris le Fonds de solidarité vieillesse), a rappelé jeudi la Cour des comptes. La crise l'a privée d'une partie de ses recettes mais «n'explique qu'un peu moins de la moitié du déficit global», estime Didier Migaud. «Notre Sécurité sociale est en déficit à peu près chaque année depuis trente ans», souligne le premier président de la Cour. De quoi «entretenir une spirale de la dette, particulièrement dangereuse pour la légitimité et la pérennité même de notre protection sociale». La dette sociale atteignait 136 milliards fin 2010. Un «poison», une «drogue» qui retarde les réformes nécessaires, prévient Didier Migaud. Pour apurer la situation, la Cour des comptes préconise que l'on transfère chaque année le déficit constaté à la Caisse d'amortissement de la dette sociale. Pour que ne soit pas prolongée la durée de vie de la Cades (censée disparaître en 2025), chaque transfert devra s'accompagner d'une hausse de sa principale ressource, la CRDS. Ce que le gouvernement a toujours refusé jusqu'ici. Au-delà de cette piste, qui éviterait de reporter sans cesse davantage le poids de nos dépenses sociales sur nos enfants, la Sécu doit se «désintoxiquer» de la dette en agissant sur ses dépenses, prône la Cour. • Hôpitaux Pour un acte identique, les hôpitaux publics reçoivent plus de la Sécu que les cliniques privées. Ces tarifs doivent être alignés en 2018. La Cour recommande une préparation plus méthodique à cette échéance inscrite dans la loi -mais déjà reportée une fois- car elle représente 7 milliards d'économies par an à trouver côté public. Les hôpitaux, CHU en tête, justifient ces tarifs plus élevés par des missions spécifiques (urgences, enseignement, recherche…). Mais ils reçoivent aussi des enveloppes forfaitaires pour assurer ces missions, dont les montants ne sont pas justifiés par une analyse précise des coûts. Les actes pratiqués uniquement dans les CHU représentent 5,5% seulement de leur activité de médecine, chirurgie et obstétrique! De l'eau au moulin de la fédération des cliniques (FHP-MCO), qui vient de porter plainte sur ce thème contre la France à Bruxelles, pour distorsion de concurrence. • Complémentaires santé Les employeurs ne paient pas de charges sociales lorsqu'ils cofinancent une complémentaire santé à leurs salariés. Une niche de 3,2 milliards qui bénéficie surtout aux salariés des grandes entreprises, dont la paie est plus élevée que celle des employés de PME. Qui plus est, les contrats collectifs souscrits par le biais de l'employeur couvrent mieux que les contrats individuels. La Cour s'interroge donc sur la nécessité de réorienter cette aide. Elle relève aussi que la CMU rembourse mieux les soins que les contrats souscrits par les bénéficiaires -un peu «moins pauvres»- de l'aide à la complémentaire santé (ACS), qui eux-mêmes offrent plus de garanties que les contrats moyens. Elle réclame des études sur ces effets de seuil et sur l'éventuelle surconsommation de soins des bénéficiaires de la CMU et de l'ACS. • Productivité des caisses Les frais de gestion représentent 3% des dépenses de la Sécu. C'est peu en proportion, beaucoup en valeur absolue: 10 milliards. Didier Migaud estime qu'un milliard peut être économisé en quelques années. Les réductions d'effectifs (en 5 ans, 6.500 postes) doivent être poursuivies avec plus de mutualisation des moyens et de souplesse. Bien que de droit privé, le statut des agents des caisses est plus rigide que celui des fonctionnaires: aucune mobilité géographique ou fonctionnelle ne peut leur être imposée. Résultat, quand ici une caisse a trop d'informaticiens, ailleurs une autre en embauche en CDD. La Cour des comptes appelle à changer ces règles à la prochaine révision de ce statut, en 2013.

jeudi 8 septembre 2011

Des mesures anti-déficits pour la Sécurité sociale

Le Figaro, 8 septembre 2011

Pour le président de la Cour des comptes, Didier Migaud, le retour de la croissance ne permettra pas de retrouver l'équilibre à court terme des comptes de la Sécu. La Cour cible les niches sociales dont le coût pour les finances publiques atteint selon elle 70 milliards.

La Cour des comptes a prôné ce mercredi des mesures pour redresser les comptes de la Sécurité sociale, en soulignant que le retour de la croissance ne permettrait pas de retrouver l'équilibre à court terme.

Son rapport annuel sur la Sécurité sociale, publié mercredi, attire aussi l'attention sur les dépenses hospitalières, qualifiant de trop lents les efforts de redressement des établissements en difficulté.

Alors que le déficit de la Sécurité sociale doit atteindre en 2010 un niveau record - évalué à 27 milliards d'euros pour le régime général (salariés du privé) -, «le retour indispensable à l'équilibre des comptes exige des réformes à effet rapide mais aussi structurelles», estime la Cour.

Niches sociales

Il passe d'abord par une progression des ressources, pour laquelle «priorité doit être donnée à la remise en cause des niches sociales». Les niches sociales désignent l'ensemble des exonérations, des réductions ou autres abattements qui s'appliquent aux cotisations et contributions sociales. Elles créent un manque à gagner pour la Sécurité sociale et pour l'Etat (qui compense en grande partie les pertes de la Sécurité sociale).

Pour la Cour des comptes, l'impact des ces dispositifs se situe entre 67 et 73 milliards d'euros pour les finances publiques, en additionnant les exonérations de cotisations et leur compensation. Soit bien plus que l'impact d'environ 40 milliards évoqué dans les rapports officiels.

Même si elle salue les efforts de réduction de ces niches ces dernières années, en tenant compte des mesures annoncées dans la réforme des retraites, la Cour exhorte le gouvernement à les «prolonger avec plus de vigueur».

Dépenses

Côte dépenses, les pistes d'économie suggérées concernent d'abord les hôpitaux. La Cour estime que les établissements doivent «accroître la productivité et adopter des mesures d'organisation et de restructuration». «Les efforts de redressement paraissent lents», juge-t-elle.

La Cour des comptes se préoccupe aussi de l'accès aux soins, jugé insuffisant dans les domaines de l'imagerie médicale (scanners, IRM) et des soins dentaires. Elle relève notamment les difficultés croissantes rencontrées par les patients face aux dépassements d'honoraires non régulés des dentistes.

Invalidité

Le rapport annuel s'est également penché sur les mécanismes de prise en charge de l'invalidité, de l'inaptitude au travail et du handicap. Conclusion: le système, alors qu'il s'adresse à des personnes fragilisées, est «illisible».

La Cour des comptes constate notamment la multiplicité des guichets, qui n'ont pas les mêmes méthodes pour évaluer l'incapacité.