jeudi 16 septembre 2010

Le plan stratégique de l'AP-HP dessine une nouvelle organisation des hôpitaux parisiens pour 2014

Le Monde, 16 septembre 2010

La réorganisation en douze groupes hospitaliers devrait engendrer 272 millions d'euros d'économies.

Lisibilité pour les usagers, adaptation aux besoins de soins... Telles sont les grandes lignes du « plan stratégique » de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris pour les années 2010 à 2014.

Après deux ans de préparation, de vives réactions des personnels et des médecins, le conseil de surveillance devait se prononcer, mercredi 15 septembre, sur ce plan qui intègre une contrainte budgétaire forte.

La réorganisation s'appuie sur la décision de 2009 de réunir les 37 hôpitaux en 12 groupes hospitaliers. En parallèle a été analysée l'évolution des besoins de la population (croissance des maladies chroniques, vieillissement), mais aussi de la médecine et de la démographie médicale. L'inquiétude est forte, par exemple, sur le futur manque d'anesthésistes. Ce qui explique en partie la volonté de regrouper les blocs opératoires.

Trois niveaux de prise en charge Pour permettre aux patients de mieux s'y retrouver, l'AP-HP veut réorganiser son offre de soins en trois niveaux, « de la proximité à la spécialisation ». Ce qui engendrera de nombreuses restructurations.

Dans chaque groupe, des activités de base devront être présentes : urgences, prise en charge de la précarité et des personnes âgées, réanimation, chirurgie générale, centre d'IVG... Au deuxième échelon se trouveront des activités intermédiaires, comme le cancer. Au troisième, d'autres dites hyperspécialisées (greffes...), à vocation régionale ou concernant des maladies rares.

Entre les hôpitaux Lariboisière et Saint-Louis par exemple, la tendance à la spécialisation va être accentuée : au premier, les activités d'urgence (AVC, orthopédie...), au deuxième, celles plus programmées comme la cancérologie. A Saint-Louis sera aussi regroupée la prise en charge des grands brûlés (adultes) pour l'AP-HP, qui ne sera plus assurée également à Cochin.

Alors que 21 hôpitaux prennent aujourd'hui en charge le cancer, leur activité sera regroupée en quelques « centres intégrés », qui interviendront du diagnostic à l'« après-cancer ». Seront aussi créés des « centres experts », très spécialisés.

Une séparation entre l'urgence et la programmation

Pour éviter que les arrivées aux urgences ne perturbent les opérations programmées ou posent des problèmes de disponibilité de lits, les deux types de prise en charge seront séparés. Dans chaque groupe sera créé un département d'aval des urgences, consacré à la prise en charge des hospitalisations non programmées.

Une réflexion par bassin de population

L'idée est de davantage tenir compte des spécificités territoriales. Un exemple est surtout parlant : l'accent qui sera mis sur l'obésité dans le groupe Avicenne-Jean Verdier-René Muret, aussi bien en termes d'accueil des patients que de recherche. En Seine-Saint-Denis, où se situe ce centre, la prévalence de l'obésité atteint 18 %, contre 14 % pour l'ensemble de la France.

Le financement en question Le projet médical semble désormais accepté, même s'il reste des points d'achoppement comme l'avenir des spécialités de pédiatrie de Trousseau. En revanche, les volets finance et emploi suscitent toujours la critique des syndicats et du Mouvement de défense de l'hôpital public, composé de médecins.

Répondant à l'obligation d'un retour à l'équilibre à partir de 2012, le plan prévoit 272 millions d'économies (sur 6,4 milliards de budget), dont plus de 200 millions concernent les dépenses en personnel. Si le nombre de suppressions de postes n'apparaît pas dans le document, 3 000 à 4 000 seraient en jeu (sur 90 000).

Le risque de dégradation de la qualité des soins et des conditions de travail est donc toujours pointé. Les sommes consacrées à l'investissement - soit 2,2 milliards d'euros d'ici à 2014 - sont, elles, jugées trop faibles, vu les besoins, même si l'AP-HP compte y ajouter 400 millions de cessions de son patrimoine.

Les représentants des médecins s'étaient déjà prononcés cet été en faveur du plan, et les syndicats contre. Un vote positif devrait avoir comme conséquence le départ du directeur général, Benoît Leclercq. Pour le remplacer, le nom de Mireille Faugère, ex-directrice des grandes lignes à la SNCF, est souvent évoqué.