vendredi 26 novembre 2010

Vers une rémunération graduée des médecins ?

Le Monde, 26 novembre 2010

Chargée d'une mission sur l'attractivité de la médecine de proximité, aujourd'hui en pleine crise, Elisabeth Hubert a remis ses propositions, vendredi 26 novembre 2010, à Nicolas Sarkozy. Elle appelle à une refonte de la rémunération des médecins.

Pour les inciter à choisir l'exercice libéral, qu'ils boudent désormais – seuls 8,9 % des nouveaux diplômés s'installent en cabinet, contre la moitié dans les années 1980 –, celle qui fut ministre de la santé dans le premier gouvernement Juppé propose de mieux prendre en compte la valeur ajoutée du médecin, en modulant les tarifs de consultation selon la difficulté du cas rencontré.

L'idée serait ainsi de mieux rémunérer une analyse d'un cas complexe avec recherche d'antécédents, qu'un simple acte technique, grâce à la création de quatre ou cinq tarifs différents. Le prix de la consultation pourrait ainsi s'échelonner de 11 à 60 ou 70 euros. Actuellement, elle est facturée 22 euros, et devrait passer à 23 euros au 1er janvier 2011, comme l'avait promis Nicolas Sarkozy aux médecins au printemps.

AGIR SUR LE LONG TERME

Si Mme Hubert reconnaît que des risques d'abus existent, elle estime néanmoins que les contrôles de l'assurance-maladie permettraient d'y faire face. L'ex-députée de Loire-Atlantique plaide également pour instaurer un forfait pour rémunérer la coopération entre médecins sur les cas compliqués. Mais elle juge que l'acte doit rester la base de la rémunération des médecins.

Pour faire face aux déserts médicaux qui s'accroissent, l'ancienne députée de Loire-Atlantique estime qu'il faut agir sur le long terme, et que la solution réside dans la fluidité du système : regroupement des médecins, partage des activités avec les infirmières, etc.

Elle propose en outre la création d'un fonds de garantie pour permettre aux médecins qui se sont installés de pouvoir plus facilement changer de lieu ou d'activité, sans y perdre financièrement s'ils n'ont pas de successeur.

MESURES D'URGENCE

Mais les difficultés à avoir accès à un médecin rencontrées dès aujourd'hui dans certaines zones exigent de prendre également des mesures d'urgence, juge Mme Hubert.

Elle propose d'y créer temporairement des missions de service public, afin que des jeunes diplômés, des remplaçants ou des médecins retraités volontaires viennent y exercer, contre une rémunération plus conséquente, dans des locaux mis à disposition par les communes.

"Si rien n'est fait, d'ici cinq à huit ans, il n'y aura plus seulement comme aujourd'hui des villages, voire des communautés de communes sans médecin, mais des cantons entiers", affirme l'ancienne ministre dans un entretien au Monde. "Ce serait condamnable sur le plan de l'éthique, de la santé publique, et sur le plan politique", ajoute-t-elle.

Nicolas Sarkozy devrait faire des annonces sur la question lors d'un déplacement la semaine prochaine. Il a d'ores et déjà évoqué au congrès des maires, mardi 22 novembre 2010, la nécessité d'une révision de la rémunération des médecins.

Laetitia Clavreul