L'Express | 12 janvier 2010
Le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, s'inquiète du nombre de réclamations révélant la banalisation de la violence en milieu hospitalier, près de 500 en 2009.
Un an après l'ouverture d'une ligne téléphonique dédiée aux questions de santé, le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye constate que les Français sont nombreux à dénoncer des situations de maltraitance ordinaire dans les établissements de santé. L'instance jouant les intermédiaires entre les citoyens et les services publics comptabilise, dans son bilan 2009, près de 500 requêtes portent spécifiquement sur la violence à l'hôpital. Et ce grief est aussi présent, de façon secondaire, dans près de 2000 autres doléances.
Le numéro du pôle santé et sécurité des soins du médiateur: 0810 455 455. Les situations varient du reproche adressé à la mère d'un jeune homme handicapé – "votre fils coûte déjà bien assez cher à la Sécurité sociale, et ceci depuis sa naissance" - aux brimades infligées à un adolescent atteint de violentes diarrhées – "nous ne sommes pas là pour ramasser ta m... ". Le médiateur recense à la fois des attentes interminables pour les familles demandant à accéder à leurs proches, des douleurs non soulagées, des toilettes imposées, des gifles, du matériel inadapté, l'absence de consentement du patient.
Une violence insidieuse et difficile à dénoncer
Cette violence banale, quotidienne, est beaucoup moins visible que des actes délictuels passibles du tribunal. Du coup, elle se montre insidieuse et souvent difficile à dénoncer. Pourtant, ses ressorts sont bien identifiés. Le personnel invoque souvent la fatigue, la multiplication des contraintes, l'organisation trop rigide. Mais il y a plus grave. "La violence naît d'un manque de respect réciproque entre patients et soignants, estime Jean-Paul Delevoye. Un climat de soupçon s'est installé dans la société en général et à l'hôpital en particulier.
Cette méfiance constitue une source de conflit, qui induit des comportements agressifs des usagers et des comportements défensifs chez les professionnels." Parmi les réclamations reçues par le médiateur, d'ailleurs, près de 60 émanent d'infirmières ou d'autres membres du personnel menacés ou insultés, notamment dans les services d'urgences.
Le concept de "bientraitance", pourtant, commence à s'imposer dans les hôpitaux. La Fédération hospitalière de France, fer de lance du secteur public, a édité en 2007 un guide opérationnel sur ce thème, destiné à ses adhérents. La Haute autorité de santé (HAS) propose, dans son manuel 2010 de certification des établissements de soins, "une mobilisation de l'encadrement [...] autour de la notion de bientraitance." S'agissant de personnes aussi vulnérables que des patients, la vigilance s'impose.