vendredi 28 mai 2010

Hôpital : des efforts de performance jugés insuffisants par les députés

Le Monde, 27 mai 2010

Voir aussi : Le projet de rapport sur le fonctionnement de l'hôpital de la MECSS (en PDF)

Peut clairement mieux faire : c'est le bilan que dresse la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), composée de députés de tous bords, dans le rapport sur le fonctionnement de l'hôpital qu'elle a rendu public mercredi soir 26 mai 2010. Y sont pointés des dysfonctionnements d'ordre local, mais tout autant d'ordre national.

La mission fait 46 préconisations pour améliorer la gestion des hôpitaux, et donc leur performance. Derrière chacune d'elles, c'est en fait un problème qu'elle soulève.

Ainsi, la MECSS propose de généraliser les paiements des patients dès leur entrée à l'hôpital, pointant un problème général de non-recouvrement des factures, notamment aux urgences ou pour les consultations externes. Elle estime la perte de recettes potentielles à 5 %.

Autre illustration de l'insuffisance des efforts de performance : l'absence de comptabilité analytique dans de nombreux établissements. Préconisée depuis longtemps, elle permet aux hôpitaux de connaître leurs coûts de production, et donc leurs forces et faiblesses par rapport aux autres.

Ne pas procéder ainsi "revient à conduire une voiture sans compteur", explique Jean Mallot, député socialiste de l'Allier et rapporteur des travaux de la mission. Celle-ci préconise la mise en place générale de ce type de comptabilité dans les deux ans, et réclame que le gouvernement y mobilise des moyens.

C'est en fait aussi au niveau national, selon le rapport, que les efforts doivent être accomplis.

La mission recommande un meilleur pilotage stratégique global, avec la mise en place d'un plan annuel d'efficience, et réclame une clarification des missions des multiples structures chargées de l'audit et de l'accompagnement des hôpitaux : Haute autorité de santé (HAS), Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), Agence nationale des systèmes d'information partagés (ASIP santé), sans oublier l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Malgré des efforts de simplification, "le panorama reste touffu et des chevauchements de compétences et dans les actions ne sont pas exclus", note le rapport.

"LES BONNES PRATIQUES NE SONT PAS TRANSMISES"

Il y est aussi demandé une accélération des dispositifs d'aides à la performance : ainsi l'ANAP a soutenu 170 établissements dans la mise en place de la comptabilité analytique, et prévoit d'en accompagner 50 par an. Soit bien trop peu, selon les députés, puisque la France compte près de 1 000 hôpitaux publics.

Pour améliorer la performance de tous ces sites, les députés prônent la mise en place et la diffusion de référentiels.

"On voit que des bonnes pratiques ont été mises en place, mais elles ne sont pas transmises d'un établissement à l'autre", explique M. Mallot. Son rapport relève aussi que la Mission nationale d'expertise et d'audit hospitalier a publié des guides méthodologiques pour améliorer les organisations, mais qu'ils ne sont toujours pas connus des directeurs d'hôpitaux !

Surtout, la mission se montre critique, non sur la mise en place de la "tarification à l'activité", qui rémunère désormais les hôpitaux au nombre d'actes réalisés, mais sur le manque d'études sur son impact, alors que ses dérives potentielles sont connues (inflation des actes pour rétablir l'équilibre financier, orientation des établissements orientations des établissements vers les activités les plus rentables…).

Les députés réclament également une meilleure surveillance de la pertinence des séjours et des actes, rappelant que les quelques études publiées relèvent un taux d'inadéquation des journées d'hospitalisation s'élevant de 15 % à 30 %.

Tous ces progrès dans la gestion des hôpitaux français paraissent plus que jamais urgents, alors que ceux-ci vont être amenés à davantage se serrer la ceinture.

Lors de la conférence sur les déficits, le 20 mai 2010, le président de la République a en effet annoncé la réduction de l'évolution des dépenses de santé, qui va passer de 3 % en 2010 à 2,9 % en 2011 et 2,8 % en 2012.

Déjà cette année, les tarifs de rémunération des actes hospitaliers ont été gelés. Mais l'objectif fixé par Nicolas Sarkozy d'un retour à l'équilibre des hôpitaux en 2012, lui, n'a pour sa part pas été repoussé.

Laetitia Clavreul